Le grand débat sur le cannabis n'en finit pas. Les plus fidèles vous diront qu'il ne s'agit ni plus ni moins d'un apaisant comme un autre : si certains préfèrent obtenir des relaxants via leur médecin et les ingérer avec un verre d'eau, eux, préfèrent le fumer. A contrario, les plus militants contre la "fumette" vous convaincront que la marie-jeanne est une drogue, ne jouons pas sur les mots, et qu'en plus d'être illégale et donc d'amener à fréquenter une population hors la loi, elle détruit le cerveau et l'organisme. Si elle est autorisée dans certains pays d'Europe, elle reste interdite en France. Face à deux discours si opposés et deux pratiques si contrastées, comment faire le bon choix ?
Vous avez peur que votre adolescent commence à fumer un joint de temps en temps ? Vous ne comprenez d'ailleurs pas pourquoi les gens aiment cela ? Pour quelles raisons finalement le cannabis est-il si apprécié, et fait-il à la fois si peur ? Différentes études avaient conclut que le THC, la molécule active du cannabis, réduisait l'impression de douleur physique. Son agissement sur le cerveau est puissant, et pourrait être bénéfique. Mais aucune recherche n'avait été effectuée sur les conséquences réelles en société. D'après une étude réalisée par des médecins américains du Kentucky, la marijuana réduirait le sentiment d'exclusion sociale.
Les effets antidouleur du cannabis
La marihuana attire de nombreux curieux, quels que soient les âges, pays ou époque. Les effets, quasiment immédiats, provoquent un désinhibition, un soulagement traduit par une impression de flotter, une euphorie et une perte de mémoire à court terme. Tout cela combiné crée, en un mot, une sensation intense de bonheur, vous êtes libéré de vos tracas. En plus de ce sentiment d'apaisement, les effets du THC agissent sur la douleur physique. Une expérience menée par Michael Lee, chercheur à l'université d'Oxford, permet de mieux comprendre les effets du cannabis sur la douleur physique. Pour mener à bien son étude, le professeur Lee a fait appel à un groupe de cobayes. Chacun d'eux a reçu soit un placebo, soit un équivalent de THC. Puis, sur leur jambe, chacun a reçu de la crème : un placebo, ou une substance qui brûle légèrement la peau.
Cette expérience a été réitérée afin que les étudiants reçoivent différents traitements. De cette manière, leurs sensations pouvaient être comparées : ils ne savaient jamais s'ils ingéraient un placebo ou une substance active. Les résultats montrent que l'individu victime de la crème ressent sa douleur de la même manière, qu'il ait pris ou non du THC. Aussi, chaque participant a distingué la crème brulante du placebo. Cependant, le rapport à cette douleur est différent : l'individu qui aura ingéré du THC sera moins gêné par la douleur, ce qui lui permettra de mieux la supporter. La douleur est la même mais le désagrément causé par celle-ci est amoindri. Ce rapport différent est dû à une modification des percepteurs dans le cerveau. Une équipe de médecins de l'Université du Kentucky a voulu découvrir si l'effet était le même sur les blessures psychologiques et sociales.
Le THC, la solution pour vivre en société ?
L'expérience, menée sur environ 7 000 participants en quatre étapes, montre que la prise de marijuana protège des conséquences néfastes de l'exclusion sociale. En effet, les chercheurs ont tout d'abord analysé 5 631 américains et leur rapport à la solitude en fonction de leur consommation de cannabis. Parmi les participants, qui d'eux même s'auto-déclaraient solitaires, c'est-à-dire reconnaissaient qu'ils étaient seuls ou en avaient l'impression, ceux qui fumaient du cannabis géraient mieux cette situation de solitude et avaient une meilleure estime d'eux-mêmes. Puis 537 personnes ont été analysées afin de jauger leur risque de faire une dépression.
La meilleure gestion de la solitude et la meilleure estime de soi font des fumeurs de cannabis des sujets moins à risques que les autres, d'après l'analyse des médecins. Les conséquences du THC ont été étudiées sur des lycéens et le sentiment de solitude. Ceux-ci présentent moins de signes de future dépression s'ils deviennent des étudiants solitaires. Enfin, quatrième et dernière étape de l'expérience : les médecins ont créé un sentiment d'exclusion sur 225 individus, en les faisant participer à un jeu. Parmi ceux qui ne parvenaient pas à jouer, les non fumeurs de marijuana se sentaient davantage exclus et avaient l'impression que les autres ne les aimaient pas.
La marijuana ne ferait que retarder le problème
La conclusion de l'étude, publiée dans le Social Psychological et Personality Science, est sans appel : la marijuana apaise les douleurs physiques comme sociales. Cependant, il peut aussi s'agir d'un moyen de ne pas faire face à la réalité et aux problèmes quotidiens. Car si le cannabis aide à supporter une douleur, il ne la soigne pas pour autant. Il agit peut-être même en sens inverse : en gérant mieux une douleur, on ne s'en occupe plus. Or la douleur est un signe corporel qui informe d'un dysfonctionnement. Ne pas le soigner revient à le laisser évoluer. Il en va de même pour les rapports sociaux. Le cannabis n'aide en aucun cas à être plus intégré en société, il ne fait qu'amoindrir les effets négatifs de cette solitude, effets qui devraient encourager à changer d'attitude.
Aussi, comme toute drogue "récréative", c'est-à-dire à usage festif, les effets peuvent être très négatifs : l'association est rapidement établie entre bonheur et cannabis et bientôt, l'absence de cannabis devient synonyme de malheur et tristesse. De plus, les effets du THC sur les émotions peuvent provoquer de graves troubles chez l'adolescent et l'adulte, qui se construisent dans un univers désinhibé et où rien n'est grave. Néanmoins, en permettant de mieux gérer la douleur, le cannabis pourrait avoir un véritable enjeu dans la médecine, notamment pour les patients non soulagés par les médicaments habituels. Mais en fumer au quotidien risque de créer une habitude de non gestion des problèmes et de la douleur, qui finalement ne fait qu'aggraver le véritable problème et ses conséquences. Et comme dit l'adage, ce n'est pas la chute qui fait mal, c'est l'atterrissage.