Avez-vous déjà réfléchi aux personnes qui composent votre entourage ? Parmi vos amis, votre famille, vos collègues, vos "followers", ceux qui "likent" vos photos ou laissent des commentaires toujours très sympathiques, avec lesquels avez-vous vraiment une relation particulière, intime, réelle ? On s'entoure parfois de gens qui peu à peu meublent le quotidien, qui font partie de la routine. Or, ce genre de relations, très communes, est un facteur de dépression très répandu.
Une nouvelle étude, menée par des scientifiques américains et publiée dans le magasine Plos One, bouscule les repères qui fondent notre société : les rapports sociaux pourraient être plus nocifs que l'on ne croit, et conduiraient à la dépression lorsqu'ils sont mal gérés. Durant une dizaine d'années, plus de 4 000 personnes, âgées de 25 à 75 ans, ont été observées afin de voir s'il existait un lien entre la santé physique et les rapports sociaux. Bien sûr, cette relation a toujours été ressentie, et il nous semble évident que les deux sont liés. Mais est-ce vraiment certain ?
N'est-ce pas, finalement, une déformation due à notre époque ou notre culture, qui aimerait que tout le monde soit ami ? Après tout, les ermites étaient heureux, et beaucoup de suicidaires ont une vie de famille épanouie. Alors, Sartre avait il raison quand il prétendait que l'Enfer, c'était l'autre ?
Les amis et la famille, ces sphères sociales néfastes
A cette époque d'amis virtuels et de relations impulsives, les scientifiques voulaient découvrir comment étaient réellement perçues les relations sociales. L'étude porte donc sur 3 grands axes : l'impact de la mauvaise qualité des relations sur le comportement, afin d'observer largement les conséquences qu'ont les diverses relations qui rythment une journée ; l'impact d'une relation négative avec le conjoint, la famille et les proches, afin d'évaluer plus précisément l'impact qu'ont les personnes proches et intimes ; et les interactions entre relation négative et évolution de la dépression, tout simplement pour voir si oui ou non, les deux sont liés.
Des questions ont été posées aux participants, afin de jauger leur ressenti par rapport aux personnes qui les entourent, évaluer la perception de la relation de la personne concernée envers son entourage. Aussi, ces questions étaient du type "si vous avez des problèmes, pouvez-vous en parler à votre famille ? à vos amis ? à votre conjoint ?" "Seront-ils prêts à écouter ?" Petite revanche pour les mélancoliques déçus et incompris, les célibataires endurcis, les taciturnes et autres amoureux du calme et de la solitude : "pas du tout" a été la réponse majoritairement donnée !
Des relations truquées pour plus de facilité
Quatre niveaux de réponse existaient cependant : "oui, complètement" "oui, moyennement" "oui, un peu" et "non, pas du tout". La majorité des participants admet donc vivre avec des gens avec lesquels aucun lien ni de confiance ni d'intimité n'existe finalement, qu'il s'agisse du conjoint ou de la famille. L'étude va plus loin encore puisque le deuxième lot de question vise la relation de "l'autre" vers la personne questionnée, avec des questions du type "vous fait-on beaucoup de remarques, de critiques ? Vous félicite-ton souvent ?" Etc.
Sans surprise, malheureusement, les réponses indiquent là encore une tension sociale élevée, un entourage nocif. Menée sur 10 ans, cette étude garantit des résultats très représentatifs du fait de son échantillon : près de 5 000 personnes appartenant à différentes générations, des 2 sexes, habitant un peu partout sur le territoire et ayant des histoires et origines différentes. En un mot, aucun point commun, et pourtant le même type de relations sociales.
Avoir des relations sociales conduirait à la dépression
Sur 10 ans, les scientifiques ont pu calculer qu'1 personne sur 7 finira par développer une dépression en restant dans cet environnement. La clé du bonheur résiderait donc dans la solitude. Car autre révélation de cette étude, ce n'est pas la solitude qui cause la dépression, c'est l'isolement. La solitude est un état neutre : être seul. L'isolement, c'est être, ou du moins se sentir, rejeté. Aussi, la fréquence des relations n'influe pas sur l'état mental, au contraire : lorsque les relations sont nombreuses mais que les gens ne se voient pas ni ne se regardent, c'est pire que de vivre seul.
Le secret serait alors de s'écarter volontairement des gens, et de choisir la solitude pour préserver sa santé, être seul plutôt que mal accompagné, comme dit le vieil adage. Si l'isolement est néfaste, vivre avec les autres l'est peut-être tout autant. Car le véritable facteur de tension est en fait l'absence d'interaction dans la relation, le manque de soutien et l'indifférence, dont les conséquences peuvent être dramatiques.
Une autre solution consisterait à tisser des liens plus vrais et plus intimes avec son entourage, et ne plus se contenter de relations fondées sur le mensonge et l'indifférence. Car si l'on ne choisit pas sa famille, on choisit ses amis, et davantage son conjoint, en principe. Inévitablement, ce genre de tension relationnelle sera d'autant plus important au sein d'un couple, du fait d'une proximité physique plus récurrente.
Source : Plos One