Partie intégrante du projet de loi consommation de Benoit Hamon, l'action de groupe est présentée ce jeudi en Conseil des Ministres. Promise puis abandonnée par Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy, véritable arlésienne du droit de la consommation, cette procédure offre la possibilité à des consommateurs de se regrouper pour intenter une action de justice collective, et non plus individuelle comme par le passé. Un outil qui pourrait grandement faciliter les démarches des victimes de litiges.
Voilà des années que les associations de consommateurs, à l'instar de l'UFC Que Choisir, réclamaient une loi autorisant la procédure d'action de groupe. Cette demande pourrait bien être prochainement satisfaite à l'issue de la présentation du projet de loi consommation de Benoit Hamon intégrant la mesure, ce jeudi.
En quoi la mise en place de l'action de groupe est-elle si importante pour les consommateurs ?
À l'heure actuelle, à défaut d'un tel dispositif, la plupart des victimes de litiges de masse voient rarement leurs dommages réparés. Ainsi, conformément à l'état du droit, chaque victime n'est en mesure d'agir qu'à titre individuel pour obtenir une réparation. En conséquence, il n'existe donc aucun moyen permettant à une association de consommateurs d'indemniser via un unique procès l'ensemble des victimes d'un litige de masse.
Et en définitive, ces dernières – faute de moyens et de temps – renoncent à agir individuellement, laissant les bénéfices frauduleux dans les caisses des entreprises. En somme, l'action de groupe simplifie radicalement les démarches des consommateurs, en leur offrant la possibilité de voir leur préjudice réparé en un seul procès.
Un dispositif à ne pas assimiler à la Class Action des États-Unis
Contrairement aux idées reçues, l'action de groupe se différencie nettement du système américain : cette dernière ne comprend en effet pas de dommages et intérêts punitifs, ni de contingent fees (taxes que les victimes doivent payer à l'avocat chargé de l'affaire) – c'est désormais une association de consommateurs sélectionnée et non plus un avocat qui agit pour les consommateurs –, ni de jury populaire. Pour rappel, pas moins de la moitié des états européens, comme le Portugal, disposent d'ores et déjà d'une procédure comparable à l'action de groupe. La France est donc en retard sur ses voisins.
À quoi sert l'action de groupe ?
Dans le cas d'un litige de consommation ou de pratiques anticoncurrentielles entrainant un préjudice matériel, une association de consommateurs (l'une des seize associations nationales agréées) agit en vue d'obtenir du juge un jugement de responsabilité indiquant si le professionnel ou l'entreprise concerné a violé la loi ou non. À l'issue de cette action de groupe, toutes les victimes peuvent potentiellement être indemnisées.
Les limites de l'action de groupe
Reste que l'efficacité de l'action de groupe sera en théorie affectée par deux éléments : le transfert de charge sur les associations de consommateurs et le délai. Dans la mesure où rien n'encadre précisément les délais, il est probable que ces actions de groupe réclament plusieurs années – voire plus d'une dizaine d'années dans en cas de pratiques anticoncurrentielles – pour voir le jour. Or, des délais trop importants posent la question de la conservation des preuves, indispensables aux indemnisations.
Autre problème : la liquidation des préjudices, autrement dit la répartition et la distribution de l'indemnisation des membres du groupe, qui devrait être confiée à l'association de consommateurs. Or, celle-ci ne dispose pas des moyens matériels, techniques et humains pour y parvenir. Pour cette raison, l'UFC Que Choisir estime qu'il serait nécessaire de faire appel à un tiers spécialement formé à cette tâche.
Ainsi, le principal enjeu est de rendre plus accessible et facile à mettre en place une action de groupe, pour ne pas dissuader les consommateurs victimes de litiges d'agir. De cette façon, l'action de groupe pourrait prochainement devenir un outil à la fois efficace et permettant de décourager les pratiques frauduleuses de certaines entreprises.
Sources : economie.gouv, Le Monde, SOS Conso, France Inter