Les habitants des quartiers réputés "difficiles" qui doivent faire face à des phénomènes tels que les trafics, les dégradations et l'occupation des parties communes des immeubles se sont organisés dans plusieurs villes, mettant en place des initiatives plus ou moins bien accueillies par les pouvoirs publics des localités concernées. Mais à un niveau national, une de ces initiatives a reçu dès juin 2012 le soutien du ministère de l'Intérieur, et correspond à un phénomène bien connu dans le monde anglo-saxon : les groupes de surveillance citoyenne, à travers les communautés de "Voisins Vigilants".
On apprenait récemment que des habitants des quartiers St Paul et St Eloi à Bordeaux, lassés d'être envahis par les dealers, ont lancé une opération "Deal Safari", qui n'est pas appréciée par tout le monde : "Prenez les dealers du quartier en photo et postez-les sur Facebook", proclament les affiches placardées dans le quartier par des riverains mécontents. Deux étudiants, notamment, pointent le risque de dérapage de cette opération, et dénoncent son caractère ambigu : "C’est la peur, moteur de la crédulité, qui a motivé cette action", analyse Guillaume, 23 ans, interrogé dans le journal Sud Ouest, avant d'ajouter : "En plus, intituler ça un safari, on sait à quoi ça fait allusion"…
Une initiative soutenue par les pouvoirs publics : "Voisins vigilants"
Mais sans aller jusqu'à encourager ces démarches curieuses (qui, en plus d'être dangereuses, sont probablement illégales), les pouvoirs publics se sont rangés du côté de certaines associations de riverains concernés qui ont importé en France le modèle des "rondes communautaires", appelées outre-Atlantique les "neighbourhood watch" (surveillance du voisinage). Le dispositif "Voisins Vigilants" est directement inspiré de cette initiative citoyenne née aux Etats-Unis, reposant sur le principe selon lequel les personnes les mieux placées pour surveiller les allées et venues des personnes suspectes sont ceux qui habitent dans le quartier, et connaissent donc leurs voisins, leurs habitudes et leur éventuelle absence. Ils sont donc aux aguets, surveillant les rues de leur quartier, et au moindre évènement suspect ils préviennent la police.
La réussite de ce système repose entre autres sur le respect de la limite que constitue le rôle dévolu à la police, et donc sur l'importance donnée à la mission de ces rondes citoyennes. Il faut avant tout informer les personnes participantes de l'étendue de leur mission : surveiller et avertir la police, et veiller à ce que personne ne décide de rendre lui-même la justice. Aux Etats-Unis, où le port d'arme est autorisé par le 2e amendement qui consacre le droit de milice, cette initiative a pu avoir pour conséquence des violences rendues inévitables par le climat de violence et de méfiance qui règne par périodes (par exemple, l'assassinat du jeune Trayvon Martin l'année dernière, par un citoyen en patrouille). C'est pourquoi le site français Voisinsvigilants souligne de façon répétée la coordination avec la police, ainsi que le fait que les participants ne doivent pas "jouer aux cow-boys", et insiste sur le fait que jusqu'ici, aucune dérive n'est à déplorer.
Pour les comités de résidents exposés à des nuisances diverses, la solution est clairement de se constituer en association de riverains, et d'adopter la démarche la plus adaptée, en gardant à l'esprit que le maintien de l'ordre est une mission réservée aux forces de police et de gendarmerie. Ils ne peuvent pas intervenir directement pour faire cesser la source du trouble. Ils doivent recueillir tous les éléments permettant d'identifier le fautif et de prouver la faute commise, puis se présenter au commissariat avec ces éléments et faire en sorte que les forces de l'ordre agissent.
Sources : Sud Ouest, Le Télégramme