Passée en quelques années d'expérience sociale de campus à phénomène mondial coté en bourse et valorisé à près d'un milliard de dollars, la firme créée par Mark Zuckerberg est en crise de nouveauté. Face aux applications et aux réseaux qui naissent tous les jours, difficile de garder la tête du mouvement et d'être encore un pas devant la tendance.
L'entreprise basée à Palo Alto, dans la Bay Area (au sud de San Fransisco), craint la concurrence. C'est ce que nous apprend le rapport d'activité présenté à la SEC, l'autorité américaine de la bourse, dans lequel la marque au fameux logo sur fond bleu analyse, au chapitre "Facteurs de risque", le possible désintérêt grandissant de ses utilisateurs au profit de nouveaux réseaux plus ludiques, ou orientés vers un usage plus adapté à l'usage de smartphones comme l'échange de photos (Instagram), de mini-messages (Twitter) ou de vidéos éphémères (Snapchat).
Comme risque, l'entreprise cotée en bourse distingue celui d'être boudé par les jeunes utilisateurs, qui ont été le cœur de cible de la marque depuis ses débuts en 2004, et la raison de sa croissance exponentielle. En effet, de très nombreux témoignages récents montrent que ceux-ci lui préfèrent des réseaux plus récents et mieux ciblés. Facebook, bien qu'il reste le réseau le plus largement partagé par cette catégorie d'âge, sert de base comme autrefois les messageries AOL, Caramail ou plus tard MSN, devancé par des utilisations plus ludiques ou centrées sur les motivations des jeunes. Autant dire déjà complètement "has been".
Snapchat, le petit fantôme d'Internet qui monte, qui monte…
L'application débarquée en 2011 s'est répandue de façon virale outre-Atlantique et est arrivée en France au début de l'année. Considéré comme le digne successeur d'Instagram, cette application permet de contrôler le devenir des fichiers envoyés, qui se détruisent après avoir été visionnés par le destinataire, au bout d'un laps de temps décidé par l'envoyeur. Ainsi, pas de risque de fuite de photo ou de vidéo compromettante et donc, la possibilité d'envoyer des contenus vraiment privés, contrairement à tout ce qui est posté sur Facebook, qui peut se retrouver sur la toile très facilement. Snapchat a donc senti l'inovation et s'est offert un bon buzz et peut-être une place au soleil, entre Twitter et Instagram, au sommet de la pyramide des réseaux sociaux virtuels. Exactement ce que craint Facebook, qui jouissait jusque là d'une relative tranquillité, étant le plus grand et un des plus vieux réseaux existant.
En réaction, Facebook a lancé sa propre application "Facebook Poke", permettant d'envoyer du contenu à durée de vie limitée, exactement comme Snapchat. Mais pourra-t-il rattraper le retard pris par rapport aux créateurs de nouveaux modes d'échange ? Il semble que le réseau social soit victime d'un phénomène "irréversible" de "bad brand" (mauvaise image de marque), selon un de ses anciens employés, Blake Ross, qui se livre sur sa page Facebook personnelle, et qu'il n'est plus utilisé par les jeunes qu'en tâche de fond, après consultation de leurs autres comptes Twitter ou Instagram. Des jeunes français expliquent que le réseau est devenu trop "banal" et ancré dans leur vie réelle pour conserver son attrait. La marque se trouve donc devant un défi qu'elle aura du mal à relever : rester le principal réseau social dans une concurrence animée par des effets de mode. Et maintenant que l'action de Facebook est surveillé par les observateurs et les analystes économiques, il s'agit ni plus ni moins que d'une question de survie.