Le ministère de la Famille a indiqué cette semaine qu'il réfléchissait actuellement à l'attribution de nouveaux droits et devoirs civiques aux grands ados âgés de 16 ans. Parmi eux, le droit de vote pour les élections locales ou encore la possibilité de créer une association ont été évoqués. Mais est-ce une bonne chose ?
Mardi, Dominique Bertinotti a annoncé mardi sur BFMTV réfléchir à l'idée d'un seuil de "pré-majorité" pour les jeunes de 16 ans. Objectif : mettre en place une étape permettant de passer "progressivement à l'âge adulte". Une façon, a-t-elle expliqué, de conquérir la citoyenneté en douceur sans "passage brutal à l'âge de 18 ans, âge auquel l'on acquiert ses droits". Ce débat va s'inscrire dans la perspective de la loi sur la famille, dont la copie devrait être rendue en fin d'année. Pour l'heure, rien n'est acté et tout à penser.
Des jeunes vraiment plus mâtures que leurs aînés ?
Aujourd'hui, on entend souvent que les jeunes sont plus mâtures que leurs aînés. À tel point qu'ils seraient capables de prendre des responsabilités. Pour les psychologues, il est en effet évident que les adolescents ont désormais des comportements de "grandes personnes" plus tôt qu'avant. Ainsi, il n'est pas rare dorénavant que les filles de 13 – 14 ans aient des allures de jeunes femmes, de même que les jeunes garçons des allures d'hommes.
Singeant les apparences des aînés, ces derniers revendiquent le droit de sortir le soir, ont des comptes Facebook, Instagram et consorts, fument, boivent et abordent souvent la question de la sexualité de manière affranchie. Surtout chez les filles, comme le met en évidence la psychologue Béatrice Copper-Royer, ce phénomène s'accompagne d'une expresse volonté de grandir vite. Dans ce cadre, elles vivent difficilement les limites fixées tant bien que mal par leurs parents.
Les garçons, pour leur part, sont plus débrouillards qu'auparavant, notamment parce que certains d'entre eux, avec la généralisation des divorces, naviguent depuis leur plus jeune âge d'un parent à l'autre. Résultat : ils ont été contraints de s'adapter à des situations complexes, entre crises, ruptures et éloignements. Dans ce contexte, ces derniers ont eu tendance en grandissant à prendre des distances avec leurs parents. Et en sus de ces difficultés affectives, s'est ajoutée l'incertitude de leur avenir professionnel, renforcé par le spectre du chômage. En somme, tous ces éléments, dans une certaine mesure, ont contribué à dessiner une génération relativement mature, assez éloignée de l'insouciance de l'enfance.
Une pré-majorité à 16 ans ?
Pour autant, bien que les jeunes soient aujourd'hui plus sensibilisés que par le passé aux situations de crises ou encore aux relations amoureuses, les spécialistes doutent de leur autonomie réelle. Selon eux, l'attente de soutien des jeunes, pris entre leur revendication d'un statut de "grand" et la peur d'abandon, est énorme. Problème : les nombreux malentendus avec les parents à ce sujet ne permettent pas à leur maturité de se construire de façon homogène.
Or, le projet abordé par le ministère de la Famille pourrait permettre de mettre en avant chez les jeunes leur faculté à être responsables, réfléchis et engagés. Ce qui leur confèrerait alors une véritable maturité. Mais à une seule condition, souligne Béatrice Copper-Royer : que les jeunes puissent nouer un vrai dialogue avec des interlocuteurs adultes, qui leur apporteront du soutien, leur feront confiance et les aideront à développer leurs réflexions.
Rappelons que lorsqu'on a 16 ou 17 ans, le dialogue intergénérationnel permet de se construire et d'aiguiser son sens critique. L'occasion d'ailleurs pour les adultes de peser les opinions et les convictions des jeunes, en leur apportant un soutien leur permettant d'avancer vers l'âge adulte.
Sources : Les Échos, La famille Sens Dessus Dessous, FranceTVinfo