Ce jeudi, les députés s'apprêtent à adopter la loi bancaire visant à encadrer le secteur. Principal enjeu : permettre le plafonnement des frais de commission d'intervention, à savoir les frais perçus par un établissement bancaire lorsqu'il autorise un compte à effectuer un paiement au-delà du plafond de découvert autorisé.
D'après un sondage de panorabanques rendu public lundi, pas moins de deux français sur trois seraient à découvert au moins une fois par an. Un phénomène somme toute relativement courant. Ce qui n'empêche pas les banques de facturer des frais conséquents, qu'il s'agisse d'un rejet de chèque ou de tout autre moyen de paiement, ou quand ces dernières valident le débit, par chèque ou prélèvement, sur un compte qui n'a en fait pas la provision requise.
C'est ce qu'on appelle les commissions d'intervention, qui s'ajoutent aux intérêts débiteurs (agios) calculés en fonction du montant, de la durée et du taux d'intérêt du découvert. Ces dernières, selon un récent rapport de la Banque de France, s'élèvent en moyenne à 8,23 euros.
Un plafond de 8 euros par opération
Lorsqu'elle sera appliquée, la loi bancaire mettra en place un principe de double plafonnement lié aux commissions d'intervention. Pour la grande majorité des clients, leur coût ne sera pas autorisé à dépasser 8 euros par intervention, et 80 euros par mois. À noter toutefois, pour les Français les plus modestes, que le plafond sera dorénavant de 4 euros par intervention et 20 euros par mois. 150 000 personnes ne disposant pas de chéquier mais d'une gamme de moyens de paiement alternatifs (GPA) sont concernées en France par cette dernière mesure.
Toutefois, ce double plafonnement a entraîné des débats houleux entre l'Assemblée Nationale et le Sénat. À l'origine, la loi n'avait en effet été prévue pour n'appliquer qu'un plafonnement pour les personnes les plus fragiles. Jusqu'à ce que les députés élargissent la mesure à l'ensemble de la population – façon de prendre en compte les classes moyennes, nombreuses à avoir des fins de mois difficiles. C'est à partir de ce moment là que nombre de banques se sont opposées au projet.
Six patrons d'entre elles (Crédit Agricole, BPCE, Crédit Mutuel, La Banque Postale, Société Générale et BNP Paribas) ont ainsi écrit une lettre au gouvernement pour aviser que la mesure supposerait des coûts colossaux pour les principales banques, alors que la banque de détail traverse une conjoncture particulièrement difficile. Reste que ce principe du double plafonnement a en définitive été retenu, principalement parce que les banques ont souligné qu'il était difficile voire impossible de "mettre tout le monde au même niveau".
Un mécanisme de régulation cependant peu durable
Même dans le cas du plafond "haut", autrement dit celui induisant un maximum de 8 euros de commission d'intervention par opération, le changement n'est pas négligeable. D'autant plus que ces derniers étaient jusqu'à présent plafonnés en moyenne à 163 euros par mois, et jusqu'à 458 euros pour la banque la plus chère. Tant et si bien que pour de nombreux ménages, l'amélioration est indiscutable. Pour rappel, explique le secrétaire général de l'Association française des usagers des banques (Afub), Serge Maître, les frais de commission d'intervention peuvent peser entre 5 % et 15% du budget mensuel.
Mais pour ce dernier, ce nouveau dispositif ne doit pas être considéré comme un mécanisme de régulation durable. Car selon lui, si les frais de commission d'intervention sont plafonnés, les banques ne vont, en effet, pas hésiter à reporter ces sommes sur d'autres. C'est le cas des frais de tenue de comptes, qui ont augmenté de 9 % entre janvier 2011 et janvier 2013.
Par exemple, en 2008, alors qu'un plafonnement de frais bancaires applicables aux incidents de paiement avait été voté – 30 euros maximum de frais bancaire dans le cas du rejet d'un chèque de moins de 50 euros, 50 euros pour un chèque d'un montant supérieur, et 20 euros pour tout autre moyen de paiement –, les anciens frais se sont reportés sur les commissions d'intervention. Commissions qui font aujourd'hui l'objet d'un plafonnement.
Pour finir, déplore Serge Maître, les 8 euros de plafonnement sont d'autre part encore assez proches de ce qui se fait en pratique et totalement indépendants du coût réel de l'opération. À tel point que les commissions d'intervention restent à n'en pas douter une niche tarifaire intéressante pour les banques.
Sources : Banque de France, Panora-Banques, Afub, Lci