Un médecin italien a déclaré qu'il serait possible d'ici deux ans à peine de greffer des nouvelles têtes aux humains. Vous avez bien compris : un tronc et une tête appartenant à 2 personnes différentes pourront être rassemblés d'ici peu. Si les avantages d'une telle opération peuvent être nombreux (retrouver l'usage de ses membres, guérir d'une maladie incurable, perdre beaucoup de poids en très peu de temps, s'offrir un corps magnifique…) les limites sont, elles aussi, très importantes.
Sergio Canavero, neurologue italien, prétend pouvoir, d'ici 2015, réaliser une greffe de tête humaine, d'après sa déclaration dans le journal scientifique Surgical neurology International. L'objectif serait de redonner aux tétraplégiques ou aux condamnés par des maladies à un stade trop avancé, un nouveau corps, sain, tout en gardant ses souvenirs, ses émotions, son identité. Alors si vous vouliez changer de tète pour les vacances, c'est bientôt possible.
Des expériences sur des chiens et sur des singes
Cette déclaration ne sort pas d'un chapeau haut de forme qu'aurait retrouvé Canavero un beau matin dans son laboratoire. Ce neurologue s'inspire en effet des travaux d'un de ses confrères, Robert White (mort en 2010), qui, dans les années 70, était parvenu à greffer sur le corps d'un singe, la tête d'un autre spécimen de la même espèce. Lui-même s'était inspiré du soviétique Vladimir Demikhov qui avait réussi à greffer sur le cou d'un chien adulte l'avant d'un chiot. Une sorte de chimère à 2 têtes bien vivante.
Les premières expériences de Robert White s'étaient focalisées sur la transplantation de cerveau d'une tête à une autre. Après ses réussites, il s'est finalement penché sur l'échange de tête complète. Les premières réussites n'avaient cependant offert que huit jours de vie au singe transplanté. Puis les expériences se sont perfectionnées : petit à petit, les nouveaux cobayes ont survécu, et les nouvelles têtes ont pu vivre indéfiniment tant qu'elles étaient en bonne santé. Reste que les singes ont par la suite été euthanasiés à cause de complications diverses.
40 ans plus tard, cette expérience revient à la Une médicale. Si de telles greffes étaient possibles avec les moyens de l'époque, les nouvelles avancées technologiques et biologiques permettent d'aller plus loin encore, en garantissant davantage de chances de survie dans de bonnes conditions. En effet, l'obstacle principal était la connexion de la moelle, qui désormais serait réalisable : d'après le neurologue, c'était le "détail" qui a ralenti les expériences depuis 50 ans. Or, cela serait dorénavant faisable grâce à des procédés chimiques.
La quête de l'immortalité ?
L'idée, c'est donc de se servir de personnes en mort cérébrale, mais dont le corps est en bon état, pour être receveur et accueillir la nouvelle tête. Le donneur, pour sa part, devra être tétraplégique ou gravement malade –sans que le cerveau ne soit touché- pour obtenir un nouveau corps. Il se verra alors couper la tête, qui sera placée en hypothermie, avant d'être recollée sur le receveur. Après l'opération, si le cobaye se réveille de l'anesthésie lourde, une longue période de convalescence permettra aux médecins de s'assurer qu'il ne rejette pas la greffe.
Dans un second temps, il lui faudra apprendre le maniement de son nouveau corps : vous savez comment bouger vos membres parce que vous connaissez votre poids, votre masse, votre force. Avec un nouveau corps, le poids, les muscles, la souplesse, le maniement… tout est différent dans les mouvements. Il faudra aussi s'assurer qu'il s'agit bien de la bonne personne, que l'opération n'ait pas traumatisé le cerveau de manière irréversible. Mais surtout, savoir s'il s'agit bien d'un humain, et de quel humain.
Entre la science fiction à la Frankenstein et le voyage de l'esprit de corps en corps, style vaudou, cette expérience pourrait pourtant être envisagée d'ici deux ans. Mais d'ici là, il faudra régler de nombreux autres problèmes : l'opération en elle-même, dont le coût est estimé à 10 millions d'euros, le nombre de personnes à solliciter (une centaine), mais surtout les questions de bioéthique. Enfin, ce type d'expérience pourrait, à terme, offrir aux plus riches l'immortalité tant qu'ils peuvent payer, et devenir ainsi la Pierre Philosophale tant convoitée, remettant de nombreux principes en question.
Sources : Le Matin ; Surgical neurology International