La Haute Autorité pour la Diffusion des Œuvres et la Protection des droits sur Internet (Hadopi) ayant pour mission de lutter contre les usages des internautes enfreignant les droits d'auteurs, elle a rendu un rapport mardi 25 février sur la diffusion de contenus protégés par streaming et téléchargement direct. Le texte propose de s'attaquer aux sites qui proposent des œuvres (films, musique, et bientôt les jeux vidéo) en streaming ou en téléchargement direct, et préconise une série de mesures, plus ou moins réalistes, pour les mettre au pas.
Le marché du téléchargement illégal pèse entre 51 et 72,5 millions d'euros par an, selon le rapport. Ce volume représente un tiers du marché des loisirs en ligne, et le streaming à lui seul pèse entre 40,9 et 58,5 millions d'euros. Un site comme feu MegaUpload, qui propose un contenu massivement illégal, tire l'essentiel de ses revenus de la publicité et des abonnements des utilisateurs. Même s'il n'y a pas de plateforme de diffusion de contenus d'utilisateurs complètement illégale, le rapport fait la distinction entre les sites qui construisent leur activité (et leur popularité, pourrait-on ajouter) sur la mise à disposition de contenus non autorisés et les sites qui peuvent héberger ponctuellement un tel contenu.
Impliquer les intermédiaires dans la lutte
Le rapport s'adresse autant aux divers acteurs privés d'Internet (fournisseurs d'accès, hébergeurs, moteurs de recherche, régies publicitaires) qu'aux pouvoirs publics. Il propose que des mesures, comme le déréférencement des sites illégaux, puissent être ordonnées sans juge, ainsi que d'étendre la portée de l'article 336-2 du code de la propriété intellectuelle (qui permet au juge de prendre "toute mesure propre à prévenir ou faire cesser une atteinte au droit d'auteur") aux biens culturels immatériels. Pour les régies publicitaires, la Hadopi propose une charte de bonne conduite, et pour les moteurs de recherche, une responsabilité limitée au cas où ils ne prendraient pas les mesures nécessaires pour protéger les droits d'auteurs. Les fournisseurs d'accès ou les hébergeurs pourraient suivre le même chemin, mais la première tentative d'utiliser ce moyen s'est soldée par un échec.
Dans ce texte commandé par le gouvernement Fillon, qui est peut-être son dernier acte, la Haute Autorité souligne les difficultés liées à sa mission et montre à quel point lutter contre les usages illégaux sur la toile est compliqué. Sites miroirs, démultiplication des sources, serveurs privés (VPN) rendant anonyme certains utilisateurs, impossibilité d'adapter la "réponse graduée" (stratégie de répression par étapes, telle celle mise en place par la loi Hadopi : d'abord un avertissement puis une amende) aux sites de streaming et absence de stratégie à leur encontre, l'autorité administrative détaille tous les obstacles qui se sont dressés sur son chemin depuis sa création en 2010. Son existence est remise en cause depuis l'élection présidentielle. Depuis sa création Hadopi est l'objet de nombreuses critiques et la mission Lescure (nommée par Aurélie Filippetti pour décider de l'avenir de la Hadopi) semble s'acheminer vers la création d'une autre autorité qui devra mener plus ou moins la même mission, jugée impossible.
Sources : L'informaticien, Metro, IT Expresso, Les Echos, Clubic, Rue 89, ZDnet