Le projet de loi d’habilitation pour prendre par ordonnances des mesures permettant d’accélérer la construction de logements a été présenté le 2 mai en conseil des ministres. Cécile Duflot, ministre du Logement et de l’Egalité des territoires, lance sa réforme de l’urbanisme et de l’aménagement, contenant certaines mesures d’urgence visant à lever les obstacles à la construction de logements.
"Répondre à la crise du logement en construisant plus et mieux, tout en préservant les espaces naturels et agricoles", c'est l'ambition du gouvernement avec ce projet de loi d'habilitation qui fait suite aux annonces faites par le Président de la République le 21 mars dernier dans le cadre du Plan d’investissement pour le logement. Cette grande réforme se fera en deux temps : d’abord, des mesures d'urgence visant à lever les principaux obstacles à la construction de logements tout en luttant contre l'étalement urbain seront prises par ordonnances.
Le texte fera l'objet d'un débat puis d'un vote au Parlement, et à partir du moment où il est adopté, le gouvernement disposera d'une fenêtre de 4 mois pour prendre ses ordonnances. 90 % d'entre elles seraient déjà prêtes, aurait confié une source gouvernementale au site d'informations Le Moniteur. Seront abordées ensuite les mesures structurelles, qui demandent une concertation et un débat parlementaire plus longs, qui feront l'objet d'une loi "Urbanisme-logement" présentée en Conseil des ministres l’été prochain.
Les 6 mesures à venir en urgence pour relancer la construction
1 - Faciliter la transformation de bureaux en logements
Le fait de transformer des bureaux en logements est aujourd'hui un casse-tête administratif : il faut adapter le plan local d’urbanisme (PLU) en passant par une procédure de modification qui dure entre 4 et 6 mois, ce qui représente un coût pour la collectivité en plus d'être un obstacle à la mise sur le marché de logements. Pour faciliter cette procédure dans les zones accueillant de l’habitat et où il y a pénurie de logements, des dérogations aux règles de constructibilité contenues dans les PLU vont être mises en place par voie d’ordonnance. Ce faisant, la transformation en habitation d’un bâtiment existant affecté à un autre usage par reconstruction, rénovation ou réhabilitation sera autorisée, et les règles relatives au volume maximal ou à la densité maximale de construction ainsi que celles qui imposent des aires de stationnement pour les logements seront assouplies. Cette mesure devrait réduire les coûts de construction et permettre des gains de temps importants.
2 - Réviser les obligations réglementaires en matière de stationnement
Les règles imposant des places de stationnement pour chaque logement conduisent à une augmentation du coût des projets (la réalisation d’une place de stationnement coûte en moyenne 20 000 à 25 000 €), si ce n'est à leur abandon. Il peut arriver que dans des agglomérations au marché de l'immobilier très tendu, le PLU impose de construire trois places de stationnement par logement, ce qui limite la constructibilité de la zone. Le gouvernement cherche à réduire cette obligation, il ne pourra pas être exigé plus d’une place de stationnement par logement dans ces secteurs dès lors que le projet immobilier est situé à proximité de transports collectifs (à moins de 500 m d’une gare ou station de transport collectif).
3 - Favoriser la surélévation d’immeubles
Pour encourager la densification d’espaces déjà urbanisés, des dérogations aux règles du PLU seront mises en place avec pour objectif de favoriser la surélévation d’immeubles et l’alignement de la hauteur entre bâtiments mitoyens. Concrètement, cet aménagement permettra, dans les zones tendues, la création de logements par surélévation d’immeubles existants, même si cela conduit à dépasser la densité maximale fixée par le PLU. De même, pour la construction prévoyant une hauteur identique à celle d’un bâtiment mitoyen déjà existant : une dérogation au Code de la construction et de l’habitation sera possible à condition qu'elle ne compromette pas la "qualité urbaine du secteur".
4 - Raccourcir les délais
Les délais et la lourdeur des procédures sont des freins objectifs à la construction. Une procédure dite "intégrée", qui rassemble l’ensemble des procédures d’autorisation nécessaires pour un projet, sera mise en place, afin de faire aboutir plus rapidement les demandes de permis de construire, tout en sauvegardant la protection de l’environnement. Le texte, dont l’objectif est de diviser par trois les délais de procédure administrative, devra faciliter la réalisation d'opérations d'aménagement et de constructions comportant principalement des logements et considérés d’intérêt général. Par ailleurs, les délais de traitement des recours contentieux vont aussi faire l'objet d'une ordonnance, afin de lutter contre les recours abusifs.
5 - Lutter contre les recours abusifs
- la possibilité, pour le bénéficiaire du permis de construire, de demander au juge la condamnation de l’auteur du recours à des dommages et intérêts en réparation du préjudice subit.
6 - Les autres mesures à venir
Plusieurs autres règles de droit seront modifiées par les ordonnances à venir. Il s'agit d'abord de relancer la construction, en facilitant l’accès aux documents nécessaires grâce à la création d’un portail national de l’urbanisme, et de développer le marché des logements intermédiaires avec la création d’un statut et d’un bail spécifiques. Les mesures qui visent à l'amélioration de la trésorerie des entreprises du bâtiment, l'augmentation du taux maximal de garantie d’emprunt que les collectivités pourront consentir, et la suppression de la garantie intrinsèque pour les opérations de vente de logements en l’état futur d’achèvement (vente sur plans), afin de protéger les accédants en cas de défaillance du promoteur en cours de chantier : les promoteurs devront s'assurer auprès d'une banque ou d'une compagnie d'assurance pour garantir aux acquéreurs la livraison de leur logement ou le remboursement intégral des sommes perçues.
Sources : Le Moniteur, Site du ministère de l'Égalité des territoires et du Logement