La Sécurité Sociale est certainement la 8e Merveille du Monde. Tout du moins de France. Être en bonne santé est aujourd'hui un luxe que peu de Français peuvent se permettre. Nous ne parlerons cependant ni de junk-food ni d'alcool, ni même de cigarettes et de leurs effets négatifs sur la santé. Car ces bombardements d'informations médicales, qui s'accumulent et fascinent de plus en plus de Français, laissent penser au patient qu'il est plus savant que son médecin. Et bientôt, le moindre trouble se transforme en symptôme évident, clair et typique de telle maladie, rare, mal soignée et qui plus est mortelle.
À maladie grave, tests médicaux importants ne laissant aucune place au doute. L'Académie de Médecine tire à ce titre la sonnette d'alarme : trop de tests inutiles sont proposés par la Sécu, et donc pratiqués car remboursés. Entre écographies, bilans de santé, examens biologiques, ordonnances diverses et variées, les actes médicaux sont souvent abusifs et l'Académie veut lutter contre ces dérives, qui coûtent cher à la collectivité et sont inutiles pour au moins 1 sur 3.
Les examens médicaux seraient inutiles ?
L'Assurance Maladie a mis en place un système de bilans de santé gratuits, proposés à tous les cotisants de l'assurance maladie. Ces examens annuels, permettant de faire un bilan de santé généralisé, sont effectués sur 600 000 personnes chaque année. Or, une récente étude portant sur près de 183 000 cas, conclut que cette politique de bilans ne réduit pas la mortalité. L'étude, publiée par la Cochrane Library, en déduit ainsi que les risques de morts ne sont pas détectés, ni globalement, ni pour les pathologies cancéreuses ou cardiovasculaires. Aussi, examen ou non, cela ne change rien. "Certains s’interrogent donc sur l’utilité réelle de ces bilans de santé effectués en France", explique le professeur Mornex dans son rapport.
Concernant les examens plus ciblés, notamment les dépistages des cancers, l'enquête indique un effet nul, voire préjudiciable. En effet, prenant comme exemple le cancer du sein : celui-ci a fait l'objet de nombreuses campagnes de prévention. Aussi, le plan mis en place est d'inviter toutes les femmes âgées de 50 ans ou plus à faire des examens de dépistage, 1 fois tous les 2 ans. Un système de double lecture des mammographies garantit la qualité des examens. Or, 1 femme sur 2 seulement fait ses examens. Cependant, de nombreuses mammographies sont effectuées hors du cadre. Leur " non inclusion dans l’ensemble du dépistage les rend inutiles au plan épidémiologique", explique le professeur. Ainsi, très peu bénéficient de la double lecture, rendant inutiles les examens, qui, répétés, peuvent, de surcroit, être dangereux.
Une relation patient – médecin compliquée
Dans la relation patient – médecin, le problème est à double tranchant : si le médecin fait trop d'examens, il ne sait pas reconnaitre une maladie, s'il n'en fait pas assez, il est incapable. Le médecin qui se trompe devient aujourd'hui un criminel ou un bon à rien, qui se fait attaquer par les patients, explique France 5 dans son analyse du rapport : "les médecins, de leur côté, avancent un autre argument, celui de la peur de passer à côté d’une pathologie. Les patients se montrent de plus en plus procéduriers et, pour ne pas être accusés d’erreur médicale, de nombreux praticiens reconnaissent prescrire systématiquement plus d’examens que nécessaire". Un docteur se doit d'être irréprochable. Aussi, il couvre ses arrières en évoquant tous les risques potentiels (tous les bébés aujourd'hui risquent d'être handicapés), et en faisant tous les tests existants. Bien des patients oublient que la médecine n'est pas une science exacte et que le corps est une machine compliquée en grande partie inconnue et incomprise. Aussi, les patients tyranniques déclarent souvent "j'ai payé, j'y ai droit", oubliant qu'il s'agit plutôt d'une chance dont ils n'ont plus conscience.
Des analyses à tout-va
Inversement, les médecins ont tendance à demander trop d'analyses. Celles-ci sont redondantes, explique le professeur Mornex, et souvent inutiles puisque les analyses de sang et d'urine ne sont pas pertinentes pour le suivi d'un patient. De plus, les formules générales, qui impliquent au minimum possible le médecin, du type "bilan thyroïdien" doivent etre proscrits. Si le médecin veut faire une analyse précise, qu'il la demande, et que les biologistes arrêtent d'accepter ces prescriptions floues. Tel est l'appel du rapport de l'Académie. Cette dernière s'étonne d'ailleurs que les dépistages en dehors du cadre organisé, les analyses répétitives et les bilans exagérés soient remboursés par la sécurité sociale, dont les couts s'élèvent à 20 milliards d'euros, qu'il faudra bien trouver quelque part.
Source : Rapport de l'Académie