L’ibogaïne est une substance hallucinogène tirée de l’Iboga, un arbuste d’Afrique centrale équatoriale. Bien connue des Bwitis qui, au Gabon, l’utilise lors de leurs cérémonies initiatiques, cette molécule intrigue la communauté scientifique depuis les années 1980.
L’ibogaïne est une molécule extraite de l’écorce de l’iboga. Composée d’une douzaine d’alcaloïdes actifs, elle agit sur les neurotransmetteurs, en particulier sur la sérotonine et le glutamate, et bloque l’accès des opiacés aux récepteurs du cerveau. Elle posséderait donc une importante faculté à lutter contre la dépendance. C’est ce qu’ont révélé des études, américaines pour la plupart, menées depuis les années 1990 sur des cultures de cellules humaines et sur des animaux.
Stanley Glick, professeur et directeur de recherche au Centre de neuropharmacologie et de neurosciences de l’Albany Medical College de New-York, a expérimenté cette substance en 1991 sur des rats dépendants à la morphine et à la cocaïne. Un succès immédiat au vu de la réduction de l’addiction de ces rongeurs deux jours après l’injection. Les résultats sur l’organisme humain sont, eux, nuancés. De nombreux individus dépendants à l’héroïne ou à la cocaïne le considèrent comme un produit miracle, et assurent avoir été guéris de leur dépendance en quelques jours. De nombreux autres ont vécu une issue malheureuse, où la substance n’avait pas d’effet sur leur addiction. Certains sont mêmes décédés.
Un fonctionnement déroutant
Les mondes pharmaceutique et médical restent dans l’ensemble circonspects face à cette substance. Les effets de cette molécule ont beau être connus aujourd’hui, personne ne peut encore trouver d’explication au fonctionnement pharmacodynamique de la plante. Les laboratoires pharmaceutiques s’en méfient, d’une part à cause de ses propriétés d’hallucinogène et de psychotrope, d’autre part car il s’agit d’une plante connue et utilisée depuis longtemps par des tribus, et non d’une découverte scientifique.
Entre son fort aspect hallucinogène et son utilisation "chamanique", médecins et chercheurs rechignent à y faire appel. Selon Deborah Mash, professeure de neurologie et de pharmacologie moléculaire et cellulaire à l'université de médecine de Miami, il s’agit d’ "une molécule psychoactive, mais pas un hallucinogène comme le LSD. Elle met en état de rêve éveillé pendant trente-six heures et, durant cet état de conscience altérée, le patient revit des expériences de son enfance et découvre les racines de son addiction". Cet effet hallucinogène agirait comme une sorte de thérapie, ou du moins un condensé anarchique de cette pratique. Le développement de l’usage de cette molécule s’est beaucoup fait par Internet et au sein de sectes. C’est la principale raison pour laquelle de nombreux gouvernements l’ont interdit, comme la France en 2007, mais également la Pologne, la Belgique, la Suisse, le Danemark et les Etats-Unis. Plusieurs études scientifiques se sont intéressées à la nocivité du produit. Une seule a réussi à lui trouver une forte dangerosité. Aujourd’hui, l’Ibogaïne reste interdite dans de nombreux pays, même si les recherches continuent en Nouvelle-Zélande, en Israël et dans d’autres pays.