Un décret paru au Journal officiel dimanche 30 octobre 2016 prévoit la mise en place des “Titres électroniques sécurisés” ou TES. Ce mégafichier recensera les données biométriques des titulaires d’un passeport français et d’une carte nationale d’identité, soit près de 60 millions d’individus.
Si l’objectif du gouvernement est de lutter contre les fraudes, certains y voient un porte ouverte aux détournements massifs d’informations. Le point sur ce fichier qui ne fait pas l’unanimité.
Un moyen de contrôle efficace
Cette base de données regroupera les informations disponibles sur les passeports et cartes nationales d’identité, telles que le nom, le prénom, la taille, la couleur des yeux, la filiation parentale, les empreintes digitales et les images numérisées de tout citoyen de plus de 12 ans. Le 2 novembre, Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, et Jean-Jacques Urvoas, ministre de la Justice, ont défendu ce dispositif en mettant en avant son efficacité contre l’usurpation d’identité.
Aucune concertation
Les opposants aux TES reprochent au gouvernement, notamment au ministère de l’Intérieur, d’avoir publié le décret les instituant en catimini. Interrogée à ce sujet, Axelle Lemaire, secrétaire d’État au Numérique et à l’Innovation, déclare n’avoir eu connaissance de la création de ce fichier qu’après la parution du décret au Journal officiel. Pourtant, le Conseil d’État avait rendu son avis en février, ce qui laissait au gouvernement plusieurs mois pour déposer son projet de loi devant l’Assemblée nationale et ouvrir les débats. Pour le Conseil national du numérique, une concertation avec les communautés d’experts aurait également permis de trouver des solutions plus respectueuses des droits des citoyens.
Des risques élevés de détournement
Lundi 7 novembre 2016, le Conseil national du numérique a demandé la suspension du décret instituant la création de ce fichier. D’après cet organisme consultatif, regrouper autant de données sensibles en un seul fichier revient à donner une cible de choix aux adversaires. Selon le Conseil, aucun système de sécurité informatique n’est inviolable et les pirates ne sont certainement pas des amateurs. Pour Michel Tubiana, président d’honneur de la Ligue des droits de l’homme, le risque viendrait également des personnes autorisées à consulter le fichier. Affaire à suivre.