La codéine, médicament antidouleur auparavant largement utilisé, peut avoir des effets indésirables particulièrement graves sur l'organisme. Pour cette raison, une alerte vient d'être lancée par le Comité pour l'évaluation des risques en matière de pharmacovigilance (Prac) de l'Agence européenne du médicament (EMA).
D'après les experts de l'EMA, il serait dorénavant nécessaire de limiter l'utilisation de la codéine, dans le cadre de la prise en charge de la douleur chez l'enfant. Depuis juillet 2012, l'Agence européenne du médicament organise la réévaluation des médicaments contenant de la codéine et utilisés comme antalgiques pour enfant. Ainsi, toute famille qui serait concernée par cette question est tenue d'en faire part à son médecin ou pharmacien.
Quid de la codéine ?
Issue du pavot, la codéine (ou méthylmorphine) est une substance qui tire son nom du grec kôdé (tête de pavot). Utilisée en tant que produit antidouleur et comme antitussif (médicament censé arrêter la toux), cette dernière partage quelques points communs avec la morphine, nettement plus puissante, à l'exception de l'effet d'accoutumance et d'attraction. Une fois dans l'organisme, la codéine se transforme pour se métaboliser rapidement en morphine, à hauteur de 10 % de la dose injectée. Une transformation qui varie en fonction des groupes ethniques et des personnes.
D'un point de vue théorique, la codéine est essentiellement utilisée pour traiter la douleur d'origine centrale. Et d'un pays à l'autre, elle peut aussi bien être prescrite seule – on parle alors de monothérapie – ou combinée avec du paracétamol ou de l'aspirine. D'autres enfin, se servent de la codéine en tant qu'anxiolytique et l'utilise par ailleurs dans la composition de certains sirops pour la toux sèche.
Pourtant, il est de notoriété publique que la codéine, dans le cadre d'un usage prolongé ou abusif risque fortement d'entrainer une tolérance, une accoutumance voire une pharmacodépendance caractérisée. Pour rappel, la codéine est parfois encore utilisée comme produit de substitution à la toxicomanie, à l'instar de la méthadone ou de la buprénorphine.
Des effets secondaires parfois gravissimes
On compte parmi les effets secondaires de la codéine, la somnolence ou encore un état d'euphorie caractéristique des opiacés (substances dérivées de l'opium et agissant sur les récepteurs opiacés). À noter qu'un de ses utilisateurs célèbres n'étaient autre que l'aviateur, constructeur aéronautique et homme d'affaires Howard Hugues, ce dernier l'utilisant notamment pour calmer les douleurs liées à ses accidents d'avion.
Reste que la décision du Prac (Comité pour l'évaluation des risques en matière de pharmacovigilance) découle de la transformation parfois trop rapide de la codéine en morphine chez certaines personnes. À tel point que la concentration sanguine en morphine, en plus d'un risque toxique, peut provoquer une grave insuffisance respiratoire. Par le passé, ce danger avait déjà été souligné à travers des cas mortels. Mais cette fois, la nouvelle étude de ce risque réalisée par l'EMA montre que de tels accidents ont également eu lieu après l'ablation des amygdales ou des végétations adénoïdes, dans le cas de l'apnée obstructive du sommeil.
Un lien entre codéine et dépression respiratoire
De son côté, la Prac, tout en reconnaissant un lien entre la codéine et la dépression respiratoire, recommande :
- que les médicaments comportant de la codéine ne doivent plus être utilisés pour traiter la douleur aigüe modérée chez l'enfant de plus de 12 ans, excepté lorsque ni le paracétamol ni l'ibuprofène ne peuvent être utilisés ;
- que la codéine ne doit en aucun cas être administrée chez les enfants de moins de 18 ans subissant une ablation des amygdales ou des végétations pour apnée du sommeil, compte tenu des troubles respiratoires préexistants de ces patients ;
- que la notice des médicaments concernés stipule les effets indésirables en cas de troubles respiratoires, et interdise l'utilisation dans ce cas.
À noter que les effets secondaires de la codéine sont également valables pour les adultes dont la métabolisation est rapide, ainsi que pour les jeunes mères qui allaitent. Enfin, rappelons que l'EMA ne considère pas la codéine comme plus efficace que le paracétamol ou l'ibuprofène pour traiter la douleur chez l'enfant.
Sources : EMA, Prac, Fda