Pour quelle raison les salariés continuent-ils d'user et d'abuser des antibiotiques alors que les spécialistes ne cessent de répéter qu'ils ne sont pas toujours nécessaires ? Pour la simple et bonne raison qu'ils nous offrent la possibilité d'être remis sur pied en un temps record sans pour autant avoir à manquer un ou plusieurs jours de travail, explique à travers une enquête la journaliste à Mother Jones Stephanie Mencimer.
Selon le site internet Mother Jones, l'inexistence de congés maladie obligatoires aux États-Unis n'est autre que le principal facteur permettant de comprendre le non recul des prescriptions automatiques d'antibiotiques. Pour preuve : pas moins de 40 % des employés et quelque 80 % des salariés les moins bien payés ne peuvent pas bénéficier de congés maladie rémunérés. Ainsi, tous les ans en moyenne, un travailleur américain ne compte que 5 jours d'absence pour des raisons médicales, contre 16 pour les Allemands et 11 pour les Suédois.
Dans l'Hexagone, selon un rapport diffusé par l'Assemblée nationale récemment, les Français seraient en moyenne en congé maladie 9 jours par an dans le secteur privé et 22 dans le secteur public. Quoiqu'il en soit, les travailleurs américains auraient donc recours à ce remède que sont les antibiotiques que dans l'optique d'éviter d'avoir à s'absenter quelques jours de leur poste de travail.
Quand l'ingestion d'antibiotiques développe une infection immune
Problème : à en croire les professionnels de la santé, entre autres relayés par l'assurance maladie française, cette potion magique est à double tranchant. Car plus une personne ingère des antibiotiques, plus cette dernière a de chances de développer une infection immune aux médicaments. Autrement dit, le fait de prendre d'abuser inutilement d'antibiotiques multiplie considérablement le risque de constituer ce que l'on appelle des supermicrobes, comme le souligne l'institut Pasteur.
En parallèle, ce phénomène de recours automatique aux antibiotiques a un coût pour les Américains et leurs assurances maladie, un gaspillage qui atteindrait chaque année le milliard de dollars. En France, voilà onze ans que l'assurance maladie communique pour amener les Français à ne pas recourir systématiquement aux antibiotiques, à travers le slogan, "les antibiotiques, c'est pas automatique".
Si Le Monde considère dans un article que la campagne a en partie porté ses fruits, le résultat final n'est néanmoins pas si reluisant. Entre 2001 et 2007, comme le souligne l'institut Pasteur, le recul des prescriptions, de - 26,5 %, a été net. Pour autant, une importante reprise a suivi par la suite – et la France demeure l'un des pays d'Europe les plus consommateurs de médicaments.
Par ailleurs, tout comme aux États-Unis, une bonne partie des prescriptions d'antibiotiques servent à soigner des infections virales comme des angines, des otites mais aussi des sinusites. Pourtant, à l'inverse des États-Unis, la France dispose de l'arrêt maladie obligatoire depuis 1928…
Sources : Mother Jones, Pasteur, Le Monde, Slate, Europe 1