Bien s'entendre avec ses collègues serait un moyen efficace d'augmenter la productivité. Pauses café, discussions, déjeuner en commun et l'entreprise fait fortune ? Une banque américaine voulait savoir pourquoi certains salariés étaient plus productifs que d'autres, pourquoi certains vendeurs excellaient quand d'autres avait des résultats moyens, pour des profils similaires.
Si beaucoup pensent que les moins productifs des salariés sont ceux qui trainent à la machine à café et déjeunent pendant des heures, tandis que les plus productifs sont les plus travailleurs, évidemment, il semblerait qu'ils se trompent.
Un salarié bien intégré est un bon employé
Le Wall Street Journal révélait en avril 2013 une petite étude de la Bank of America. Cette dernière a proposé à 90 de ses salariés de porter un badge. Mais ce badge n'est pas anodin : il transmet à une base de données chacun des mouvements du porteur. C'est ce qu'on appelle le Big Data. Une cinquantaine d'organisations a participé à ces études, dont les résultats sont assez déroutants.
Contre toute attente, les salariés les plus sérieux sont aussi les moins productifs. En effet, les meilleurs salariés faisaient partie d'équipes soudées et discutaient souvent avec leurs collègues. Discuter avec ses collègues est un moyen immédiat d'avoir des avis différents sur le travail produit et ainsi à affiner son rendu. A cela s'ajoutent les pauses et la bonne entente avec son entourage, éléments qui encouragent à venir le matin, et donc à s'appliquer. Si le salarié est content de son entreprise, il y travaillera bien car il prendra du plaisir à son ouvrage. Voyant cela, la banque a décidé de mêler les travailleurs solos à des groupes soudés, et à favoriser une bonne cohésion. La productivité aurait alors grimpé de 10 %.
La chasse à la bonne idée est ouverte
Cubist Pharmaceuticals, comme Bank of America, a proposé à ses salariés de porter des badges qui analysaient la fréquence de parole et l'intensité de la voix, mettant ces données en relation avec le résultat professionnel. Cubist Pharmaceuticals a fait un lien entre discussion en face-à-face et productivité, et constate que les niveaux d'activité sociale sont très hauts à l'heure du déjeuner, confirmant les premiers résultats de la banque. A la suite de ces études, tout au sein de l'entreprise est analysé, afin de pousser les salariés à se parler, à déjeuner ensemble, à se fréquenter.
Aussi, les entreprises ayant des tables de 12 personnes dans le restaurant seraient plus productives que les entreprises ayant des tables pour 4. Plus on est de fous, plus on rit, dit l'adage, et une ambiance positive se ressent sur l'activité professionnelle. Des tables plus grandes incitent les employés à se fréquenter entre services. La peinture, le sol, la lumière, qu'il s'agisse de la cafèt' ou des salles de réunion, tout est remis à neuf pour que le salarié s'y sente le mieux possible. Comme certains ne déjeunent jamais avec leurs collègues et ne font jamais de pause café ou cigarette, un "break" peut parfois être imposé : pause obligatoire pour stimuler les relations, sachant que le déjeuner en commun est fortement conseillé. Cette préoccupation patronale, risque pourtant de se heurter à la liberté élémentaire individuelle.
Big Brother is waching you
La sensation d'être espionné n'en est que plus forte. Car il ne s'agit plus là d'avoir une autorité qui surveille que vous faites bien votre travail, mais d'un capteur présent sur vous du matin jusqu'au soir, qui analyse chacun de vos mouvement, et même les non-mouvements. Ne pas souhaiter déjeuner avec ses collègues pour une raison x ou y signifierait désormais être non productif. Ces moyens, très intrusifs, ne font que réduire la part de liberté du salarié qui bientôt se voit contraint de suivre une route toute faite sous peine de se faire virer.
Pire encore, un scientifique, le Docteur Waber, prétend pouvoir connaitre les intentions de démission des employés grâce à leur comportement. Autrement dit, vous portez le badge et vous vous comportez d'une certaines manière, cela traduirait votre envie de quitter la société. Plus loin encore que la police de la pensée, il s'agit là de la répression d'intention, sortie tout droit de la science fiction. Même la démission, acte ultime du salarié en détresse, se voit volée.
Source : Wall Street Journal