En ce mois de juillet sous une chaleur intense, pratiquer le ramadan tout en travaillant peut être un programme difficile à suivre pour certains. Alors que sur les 6 millions de musulmans en France, 70 % déclarent pratiquer le Ramadan, la question de l'aménagement des horaires ou des conditions de travail se pose inévitablement : que prévoit la loi, quels sont les droits des salariés concernés et quel est le pouvoir d'action de l'employeur ?
La question de l'aménagement des horaires est épineuse car elle aborde à la fois la liberté fondamentale de pratique de la religion et l'adaptation de l'entreprise à un culte personnel et individuel. Aussi, le Code du Travail ne prévoit rien pour ce type de situation. Néanmoins, il est possible d'aménager l'emploi du temps.
La religion dans l'entreprise
Un salarié peut pratiquer sa religion tant qu'il respecte les 6 critères définis par la jurisprudence. Ainsi, il ne doit pas :
- entraver la sécurité de l'entreprise ;
- entraver les conditions d'hygiène ;
- entraver l'organisation des services ;
- entraver les intérêts commerciaux ;
- faire du prosélytisme ;
- mettre en péril la mission pour laquelle il a été embauché.
En fonction du poste et de l'emploi, le respect de ces six critères ne sera pas forcément évident. Un cadre - ou un employé pouvant travailler à distance - pourra davantage aménager ses horaires tout en respectant les objectifs qui lui sont fixés. C'est autrement plus difficile pour un ouvrier par exemple, rappelle Lylia Luc-Bouzar, juriste en droit du travail.
L'aménagement des horaires : personnel et individuel
Si vous désirez des aménagements dans votre emploi du temps, il faudra en discuter avec l'employeur, au cas par cas. Et les autorisations se feront "à l'amiable" et non sous couvert d'un texte de loi. Pour Lylia Luc-Bouzar, les aménagements doivent rester personnels et individuels : le cas contraire risquerait de créer une sorte de communautarisme. De plus, tous les concernés par le jeûne ne souhaitent pas forcément d'aménagements.
L'acceptation dépend de l'ambiance générale
Qu'il s'agisse d'une PME ou d'une multinationale, la question se réglera toujours de façon différente. Dans les deux cas, le ramadan peut aussi bien provoquer une perte d'efficacité, de la tension dans les équipes que le contraire : les emplois du temps peuvent être changés de façon naturelle, les employés s'entraider, la gêne minimisée. Tout dépendra de l'ambiance de l'entreprise, et de la façon dont est amené le sujet. Aussi, tâchez de positionner le ramadan comme n'importe quel autre motif d'aménagement d'horaires : n'oubliez pas qu'il ne s'agit pas d'un droit.
Opter pour un compromis
Cependant, pour l'employeur, un bon salarié est un salarié efficace. Et pour un salarié, une bonne entreprise est une entreprise qui lui permet de s'épanouir. Aussi, l'objectif est d'adopter un compromis. D'après un sondage IFOP de 2008, environ 1 employeur sur 4 (26 %) déclare aménager les horaires des salariés pour des raisons religieuses. Si cela n'est pas obligatoire, le refuser serait contre-productif. Enfin, il ne faut pas oublier la dimension de sécurité.
Dans le cadre d'un repas d'affaire, vous pouvez décliner l'invitation, en évoquant une impossibilité calendaire ou personnelle par exemple. Vous pouvez aussi en parler à votre supérieur pour aménager les dates. Ne pas assister de facon récurrente à un repas d'affaire peut vous exposer à des sanctions si vous faites défaut à votre poste. Ainsi, si le rendez-vous ne peut être déplacé et que vos fonctions vous obligent à y assister, sachez que l'on ne peut pas vous obliger à manger en soi. Vous devez juste être présent. Jeûner n'est pas un motif de licenciement.
La dimension de sécurité
L'employeur a l'obligation de garantir la sécurité de son employé et ne pas le mettre volontairement en danger. Or, les emplois nécessitant une forme physique ou s'exerçant à l'extérieur (déménageur, paysagiste, bâtiment…) seront davantage contraignants lors du ramadan, et les horaires difficilement modulables.
Néanmoins, de petits aménagements peuvent être effectués facilement : décaler les horaires d'une heure, faire sauter la pause déjeuner pour partir plus tôt, ou encore éviter que le concerné soit trop au soleil ou soulève de trop grosses charges…
Si l'employeur ne peut aménager votre temps de travail, le ramadan interdit de mettre sa santé en danger : si la sécurité est mise en péril, rompre le jeûne est une obligation.
Sources : Juritravail.com ; Terra Femina ; economie.matin.fr