AVC, chocs traumatiques, accidents cérébraux… Ces mots font peur car jusqu'à présent ils étaient synonymes de décès, paralysie ou, au mieux, survie avec graves séquelles. Cependant, une étude de décembre 2012 menée par des chercheurs de l'Université de Géorgie et par le Collège de Pharmacie de l'UGA, approfondie et republiée fin février 2013 dans le Journal of Experimental Pharmacology and Therapeutics, change la donne. Les scientifiques prévoient un traitement d'ici 5 ou 10 ans.
De nouvelles fonctions d'un médicament pourraient soulager, voire éliminer, les différents traumas cérébraux. Cette découverte réoriente considérablement la médecine traitant les troubles cérébraux (la neuroscience), et met en lumière certaines données clé du fonctionnement de l'organisme.
Les mécanismes incroyables du cerveau
Le médicament-mystère dont il est question est un hypertenseur, répondant au nom de Cadésartan. Il a été remarqué que celui-ci favorise le "processus de croissance de nouveaux vaisseaux sanguins (néovascularisation) à partir des vaisseaux existants" (INSERM). Ce processus est communément appelé l'angiogenèse, et est en fait la cicatrisation automatique du cerveau. Elle est naturelle, et se "déclenche" après un choc cérébral type AVC, mais insuffisamment pour éviter les séquelles. Or l'utilisation de ce médicament était évitée, l'hypertenseur diminuant l'apport d'oxygène dans le cerveau, phénomène peu conseillé pour un rescapé d'AVC.
De plus, le médicament accélère la création de nouveaux neurones, en augmentant la protéine responsable de cette fonction (le "facteur neurotrophique issu du cerveau" ou BDNF, pour Brain-derived neurotrophic factor). Pour cela, le Cadésartan stimule la zone cérébrale responsable de l'angiogenèse (recréation de vaisseaux sanguins) appelée "récepteur AT2". En stimulant l'AT2, le Cadésartan augmente la sécrétion de BDNF (la protéine recréatrice de neurones) et donc le nombre de neurones, favorisant de nouvelles connexions cérébrales.
Que le Cadesartan répare les vaisseaux sanguins, cela avait été constaté. En revanche, concernant la protéine BDNF, c'est "une chose vraiment unique [et] l'effet est distinct de l'effet antihypertenseur" explique le co-auteur d'étude Ahmed Alhusban. Ce médicament pourrait aider l'organisme à récupérer des forces et à réduire tout type de handicap survenant après un AVC, en stimulant la reconstruction cérébrale et neuronale.
Voici un scanner cérébral montrant un Accident Vasculaire Cérébral de l'hémisphère droit (partie sombre à gauche de l'image)
Les conséquences insoupçonnées du médicament
AVC signifie Accident Vasculaire Cérébral, et se décline sous plusieurs formes (infarctus, hémorragie) soit une rupture d'un vaisseau sanguin du cerveau provoquant une hémorragie interne. Les séquelles cérébrales (perte de la parole, de la mémoire, des mouvements etc.) surviennent du fait de cette rupture d'une part, et de sa mauvaise "cicatrisation". Ce problème pourrait bien être oublié, ou du moins diminué, en aidant le cerveau à réparer la blessure : les facteurs BDNF ont un rôle très important dans les processus d’apprentissage et de mémorisation. Aussi, les chercheurs ont continué leurs travaux et ont montré que le Cadésartan pourrait potentiellement soigner la maladie d'Alzheimer ou en réduire les effets.
Les malades d'Alzheimer sont victimes d'une perte de cette protéine BDNF, qui pourrait être la cause elle-même de la maladie. Stimuler sa création pourrait donc considérablement aider les cellules à se reconnecter, à régénérer un tissu solide, et la mémoire pourrait alors revenir. Il en va de même pour la dépression nerveuse, caractérisée aussi par une baisse de cette protéine, ou tout type de pathologies ou traumas du cerveau.
Le paradoxe médical
La dimension incroyable de cette découverte ne réside pas dans l'annonce de la possible guérison des AVC ou d'Alzheimer mais dans le paradoxe entre ses effets induits et les résultats constatés. Aussi étonnant que cela puisse paraitre, ce médicament n'est pas censé avoir de tels effets bénéfiques dans un cas d'AVC : l'hypertenseur est plutôt déconseillé pour les victimes d'AVC dont le cerveau a besoin d'oxygène, et en ralentir l'apport pourrait être fatal. De plus, il n'avait jamais été constaté qu'une composante de ce médicament favorise la sécrétion de protéines de la mémoire. Un traitement est prévu, et les chercheurs travaillent d'ores et déjà dessus. Ils espèrent l'avoir mis au point d'ici 5 à 10 ans.
Sources : Université de Géorgie