Que diriez-vous de bannir à jamais les tickets ? Ils prennent de la place, se mélangent avec les autres papiers… Et à l'ère du numérique, c'est inconcevable, des tickets en papier... Ils pourraient aisément être remplacés par un système de reconnaissance faciale. Les caméras aujourd'hui sont assez au point pour qu'un tel système puisse s'installer, et avec le cloud, tout serait connecté. La RATP, séduite par cette dimension pratique, a proposé de remplacer les péages à tickets par des caméras à reconnaissance faciale, afin d'améliorer la qualité de son réseau. Le projet n'a pas reçu le succès escompté.
Le grand projet novateur de la RATP visait donc à remplacer les tourniquets, portes et autre péage à ticket par une caméra. De la sorte, finis l'attente, les fraudes, les bouchons. Sur un coup de tête, le tout se débloque et vous pouvez passer.
Ouvrir les portes du métro en un clin d'œil
Imaginez-vous, plutôt que de faire la queue pour accéder aux quais, vous n'auriez qu'à vous tenir devant la caméra. Celle-ci, reliée à un moteur de reconnaissance faciale, validerait ou non l'ouverture de la porte en fonction de votre abonnement. Pour être en règle, il vous suffirait de laisser votre signature biométrique. En d'autres termes, votre visage deviendrait votre pass. Hypersensibles, ces caméras garantissent davantage de fluidité : le temps de passer votre ticket dans les machines, il se déroule au moins 30 secondes. Temps minime, certes, mais en cas d'affluence, cela provoque des files, des tensions, des accidents. La reconnaissance faciale, elle, est quasiment immédiate, et aurait promis de grandes améliorations. "Aurait promis", car le projet a été avorté, avant même d'avoir vu le jour et, soi disant, sans que le père ait été mis au courant…
Tout a commencé mardi 21 mai 2013 quand le blog Sete'ici découvre sur le site de l'associations d'entreprises PactePME.org un "appel à compétence" : les directeurs de PME pouvaient, jusqu'au 23 juin prochain, candidater pour participer au grand projet d'un "nouveau concept de péage de transport public, sans barrière anti-fraude, capable d’une détection automatique du voyageur, en entrée et en sortie ", selon le cahier des charges. Cette idée aurait pu contribuer à mettre en place un système bien huilé à la fluidité remarquable, assurer un décompte précis des utilisateurs ainsi qu'une bonne évaluation des timings moyens, bref, un tout-en-un révolutionnaire qui aurait peut-être permis de grands changements sur le réseau. Cependant, pour pouvoir assurer ce bon fonctionnement, chaque usager doit fournir sa "signature biométrique". En d'autres termes, être complètement fiché.
Un clin d'œil contesté qui vire au voyeurisme
Avec cette technique de péage, il serait impossible d'être incognito où que ce soit en région parisienne. Car s'il devait s'appliquer aux métros, il devait aussi être installé sur les bus ! Chacun de vos mouvements aurait donc été enregistré, et la RATP aurait su où vous allez, quand et pour combien de temps. Et même avec qui. Selon le journal Numérama, qui a suivi de près les avancées du mystérieux projet, la Régie des Transports a confirmé qu'une "unité de la RATP a effectivement lancé cet appel à compétences pour un projet d’étude d’un nouveau concept de péage de transport public". Comparée très rapidement à Big Brother à cause de la dimension de contrôle généralisé de la population, la RATP a réagi immédiatement : tous les documents ont été supprimés d'internet.
En effet, 3 documents faisaient preuve de l'existence de ce projet : un lien vers l'appel à compétence, qui se trouvait au milieu d'une liste d'autres appels. Celui-ci n'y figure plus. Deuxième document, la présentation du projet, et enfin, le cahier des charges pour les intéressés qui voulaient en savoir davantage. Désormais, vous tombez sur une "erreur 404", à savoir le néant informatique, la page n'existe plus. Mais grâce au dernier article du blog Sete'ici, qui a suivi l'affaire, les documents ont été retrouvés. Eh oui, internet n'oublie rien. Aussi, l'appel de compétence peut se consulter en passant par Google cache. Cependant, la RATP, précise qu'il "s’agit d’une initiative non validée par la hiérarchie et qui ne correspond pas à la déontologie de l’entreprise". Elle conclut que le projet est "définitivement abandonné". Il aura tenu 24h.
Néanmoins, l'utilisation des caméra de surveillance a fait plusieurs fois leurs preuves. Notamment suite au meurtre d'une jeune femme dans le métro parisien, dont l'agresseur avait pu être identifié grâce aux caméras... Reste à savoir si la sécurité vaut la liberté.
Sources : Pactepme.org ; Sete'ici ; Numérama