La nouvelle fait éclat : la cigarette aurait des vertus nocives sur l'organisme. Lors d'une crise d'anxiété ou de colère, rien de tel qu'une bonne cigarette, disent les fumeurs, car son effet est apaisant. L'envolée de la main, ce moment privilégié où tout participe à se sentir mieux. Pourtant, à part causer divers dommages de santé et favoriser l'anorexie du porte-monnaie, les véritables effets de la cigarette restent mystérieux. Aussi incroyable que cela puisse paraître, la fumée de cigarette expirée auprès d'enfants contribuerait au développement d'un comportement antisocial voire agressif.
Si l'on sait que la fumée de tabac est nocive, on ne sait pas vraiment dans quelle mesure. Mieux vaut prévenir que guérir dit le dicton, et de nombreux moyens de prévention ont été petit à petit mis en place ces 10 dernières années. Mais si la santé physique était le cheval de bataille des autorités sanitaires, jamais personne ne s'était préoccupé de la santé psychologique…
Une étude statistique sur 10 ans
L'accessoire jadis indispensable à la virilité de l'homme moderne est définitivement banni, et regardé d'un mauvais œil. Dans les lieux publics, les cafés, les restaurants, les bars et tout autre espace accueillant fumeurs et non fumeurs, la cigarette a été prohibée. Les interdictions sont allées jusqu'à vouloir sanctionner les automobilistes fumant en présence d'enfants dans leur voiture. Lorsque l'on fume, il existe 2 fumées : celle qui s'échappe de la cigarette, qui n'est que le produit de la combustion, et celle qui est inhalée par le fumeur puis expirée, appelée fumée secondaire ou seconde fumée. "La seconde fumée est plus dangereuse que la fumée inhalée", explique Linda Pagani, chercheuse à l'Université de Montréal, car elle est chargée à 15 % de nombreux polluants, et qu'elle se respire pendant plus longtemps.
Si le fumeur est victime de dépendance et voit son comportement changer lorsqu'il est en manque, qu'en est-il de son entourage ? La chercheuse a décidé d'étudier les différentes conséquences que le tabagisme passif pourrait provoquer. Dans son étude, publiée le 21 mai 2013 dans le Journal Of Epidemiology & Community Health, elle s'est focalisée sur l'évolution de plus de 2 000 enfants, depuis leur naissance jusqu'à leurs 10 ans, en prenant en considération leur milieu familial : fumeur ou non. Elle a observé leur passé, puis l'a combiné aux déclarations de leurs parents quant à l'exposition de leur enfant à la "fumée secondaire". Enfin, les déclarations des enseignants, et des enfants eux-mêmes, sur leur comportement en classe ont été superposées aux différents parcours. Pagani arrive à la conclusion que les enfants jugés turbulents par les professeurs sont ceux dont les parents fumaient durant la jeune enfance.
Le tabac rendrait donc violent
Ne pouvant pas elle-même mettre les enfants en conditions de "seconde fumée", elle s'en est remise à leurs parents. En effet, ceux-ci élevaient leurs enfants tandis que se déroulaient ses recherches, faisant de cette étude une véritable "expérimentation naturelle" à taille humaine des conséquences du tabagisme passif sur le développement des enfants. La conclusion laisse pantois : les enfants qui ont été exposés à cette fumée, même de façon temporaire, sont plus susceptibles d'être agressifs et antisociaux vers l'âge de 10 ans et ultérieurement. Et ce indépendamment à la fois du caractère agressif ou antisocial de leurs parents, et d'une grossesse menée toute cigarette allumée. La conclusion est en accord avec les résultats d'études précédentes qui déjà montraient comment la fumée de cigarette pouvait asphyxier le cerveau des enfants et en ralentir le développement.
Durant la petite enfance, le cerveau de l'enfant est encore en formation. En interférant avec les mécanismes naturels de développement, la fumée de cigarette modifie sa conception. Pourtant, pas moins de 40 % des enfants sont encore victimes de tabagisme passif. C'est la toute première fois qu'une étude longitudinale (sur la longueur, plusieurs années de développement des enfants) est effectuée sur les troubles sociaux émanant de la cigarette. Bien que les résultats ne soient pas scientifiques, puisqu'il s'agit de comparaisons comportementales, les données statistiques sont assez nombreuses et précises pour pouvoir tisser, pour la première fois, un lien entre le tabagisme passif et les comportements déviants.