Vendredi lecture : découvrez l'écriture à quatre mains
Publié leL’image de l’écrivain solitaire travaillant dans son bureau, hier à la lueur d’une bougie et aujourd’hui le visage éclairé par son écran d’ordinateur, est inscrite dans l’imaginaire collectif. On aime cette représentation qui se vérifie bien souvent dans la réalité. De nombreux auteurs nous rappellent que la solitude fait partie intégrante de la vie d’un écrivain. Cependant, il serait bien exagéré d’en faire une généralité. En effet, l’écriture à 4 mains associant 2 plumes pour élaborer une seule œuvre est bien plus répandue qu’on ne le pense.
Une forme d’écriture méconnue et méjugée
L’écriture à 4 mains souffre d’un manque de légitimité. Certains y voient un genre mineur quand d’autres décident de ne même pas la regarder. Pourtant l’écriture en collaboration a offert à la littérature de magnifiques productions. Le duo Michel Lafon et Benoît Peeters le rappelle dans leur livre, lui même rédigé à 4 mains : Nous est un autre. Ils reviennent sur les grands duos d’écrivains, éphémères ou durables, affichés ou cachés et soulignent toutes les richesses que l’écriture en collaboration peut apporter.
On trouve de très belles associations littéraires au sein de même famille : les frères Grimm et leurs contes, les frères Tharaud et leurs récits de voyages ou encore les frères Goncourt. Ces derniers sont l’exemple d’une osmose absolue tant affective que littéraire avec le Journal.
Certaines collaborations sont moins connues ou ont été oubliées au fil du temps. On célèbre à juste titre Alexandre Dumas et ses mousquetaires mais on omet souvent que le premier jet était le fruit du travail d’Auguste Maquet. On associe bien sûr Marx à l’écriture du Capital sans parler du travail décisif fourni par son ami Engels. De nombreux écrivains ont en effet besoin de ce travail collaboratif pour produire leurs œuvres, d’autres y voient l’occasion d’expérimenter une nouvelle approche créative.
L’écriture collaborative et le roman policier
L’écriture à 4 mains semble être plus reconnue dans la littérature policière. La rencontre de Pierre Boileau et Thomas Narcejac débouche sur des œuvres aussi célèbres que Celle qui n’était plus, adaptée au cinéma par Clouzot avec Les Diaboliques ou D’entre les morts adapté par Hitchcock sous le titre Vertigo. Henri Viard et Bernard Zaccharias de leur côté ont pratiqué la parodie d’œuvres célèbres comme Hamlet avec L’Embrumé ou Don Quichotte dans Aristocloche. Mais l’on peut aussi parler de Jean Bazal et Roger May ou Jean-Patrick Manchette et Jean-Pierre Bastid rédigeant Laissez bronzer les cadavres ! ou encore Corinne Bouchard et Pierre Mezinski. Les auteurs semblent se nourrir de l’imagination de leur partenaire et osent plus de choses. L’émulation créée par l’écriture à 4 mains paraît très bien s’adapter au genre policier.
2 romans pour un projet commun
Dans cet univers de l’écriture collaborative, le projet Avec elle et Sans elle, est assez inédit. Cette fois, les 2 auteures écrivent 2 romans dont le point de départ est identique : un événement qui vient bouleverser la vie de jumelles monozygotes qui se ressemblent comme deux gouttes d’eau.
Avec Sans elle d’Amélie Antoine, une des jumelles, Jessica 6 ans, disparaît un soir de 14 juillet. Sa sœur Coline doit apprendre à vivre seule, sans son double. A l’inverse, dans Avec elle de Solène Bakowski, les deux jumelles grandissent ensemble, s’adorent et finissent par se jalouser. Les deux romans peuvent se lire indépendamment mais servent un projet commun. Une jolie manière de collaborer et une nouvelle preuve de toutes les richesses qu’offre l’écriture à 4 mains.
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