Lieu jaune : tout savoir sur ce poisson

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Un lieu jaune de belle taille pêché et remis à l'eau par Arnaud Filleul
Un lieu jaune de belle taille pêché et remis à l'eau par Arnaud Filleul
C'est l'un des plus beaux poissons et des meilleurs poissons de notre littoral, s'il est un gadidé recherché par les pêcheurs sur nos côtes, il s'agit bien du lieu jaune.

Un joli poisson de nos côtes

Beaucoup plus fréquent que la morue, sa cousine, il peut atteindre de très belles tailles, pour le plus grand plaisir des pêcheurs.
1,30 mètre pour 23 kilogrammes, voici la taille et le poids qu'un lieu jaune peut atteindre, de quoi laisser le pêcheur un brin rêveur. Car le lieu jaune, ce n'est pas seulement un petit poisson côtier, que les enfants prennent avec leur ligne légère le long des digues de Bretagne. C'est aussi un magnifique poisson de pêche sportive, qu'il faut souvent aller chercher dans les profondeurs des ses repères rocheux, voire dans les épaves.

Lieu jaune et merlan
Lieu jaune et merlan

Comment le reconnaître ?
Le lieu jaune présente les caractéristiques anatomiques communes à de nombreux membres de la famille des Gadidés.

Il possède trois nageoires dorsales (la plupart des poissons non-gadidés en ont une ou deux), et deux nageoires anales (une seule chez la plupart des poissons). Ces nageoires sont totalement dépourvues d'épines, elles ne comportent que des rayons mous. Les nageoires pelviennes sont jugulaires, ce qui signifie qu'elles s'insèrent en avant du niveau des nageoires pectorales. Les écailles sont minuscules, et la peau est parfaitement lisse au toucher. La robe du lieu jaune est variable, plus homogène chez les adultes que chez les juvéniles, ces derniers montrant souvent des marbrures du plus bel effet. Le lieu adulte montre en général un dos brun, des flancs dorés, un ventre blanc. On notera également un prognathisme assez prononcé et une nageoire caudale au bord postérieur pratiquement droit.

Une famille très importante
Les Gadidés sont des poissons de première importance pour le pêcheur des côtes françaises, notamment ceux qui pratiquent en hiver. En effet, ces poissons d'eau froide, à l'inverse de beaucoup d'autres espèces de nos côtes, sont plus courants en hiver que durant la belle saison. Les caractéristiques anatomiques de la famille sont nombreuses. On remarque souvent la présence de 3 nageoires dorsales sans épines, de deux nageoires anales, de nageoires pelviennes jugulaires, c'est à dire insérées en avant des nageoires pectorales, d'un pédoncule caudal étroit mais allongé supportant une caudale au bord postérieur souvent droit. On notera également le barbillon mentonnier chez plusieurs espèces. Les écailles sont minuscules et la peau est parfaitement lisse au toucher.

Avec toutes ces caractéristiques, les Gadidés sont finalement des poissons assez spécialisés, malgré leur silhouette classique au premier regard. D'ailleurs, dans les archives fossiles, on ne les rencontre que depuis le Rupélien, un étage de l'Oligocène daté à -30 millions d'années.

Cette période vous semble peut-être énorme, mais ce n'est une goutte d'eau dans l'histoire évolutive des poissons.
 

Des poissons d’eau froide

Cabillaud ou morue
Cabillaud ou morue

Les Gadidés sont des poissons d'eau froide. Par exemple, la répartition du lieu jaune s'arrête au sud au niveau du golfe de Gascogne, alors qu'il est présent au nord jusqu'en Norvège. En conséquence, on ne rencontre pas ces jolis poissons en Méditerranée. Les Gadidés forment une famille relativement restreinte, avec 30 espèces réparties dans 15 genres. On peut citer, pour exemple, quelques espèces présentes en France et classés au sein des Gadidés : le merlan, le lieu noir, la morue (la morue et le cabillaud sont une seule et même espèce de poisson. On doit employer le mot cabillaud lorsque ce poisson est frais et morue lorsqu'il a été salé), l'églefin, les 3 espèces de tacaud, les motelles et la lingue.

Notons que motelles et lingue (mais aussi la lote d'eau douce) sont parfois classés dans une famille à part, les Lotidés.

Dans les rochers et au fond
D'une façon générale, il est bien rare de prendre un gros lieu depuis la côte, car les repères rocheux les plus côtiers abritent surtout des juvéniles.
Certaines configurations particulières, telles les fosses rocheuses près du bord, permettent cependant de croiser des poissons corrects, autour du kilogramme. Mais cet animal benthopélagique s'éloigne du bord au fur et à mesure de sa croissance, pour former des bancs de taille variable plus au large.

Le poste-type est le plateau rocheux du large, par des fonds d'une bonne vingtaine de mètres. Dans ces environnements, la nourriture abonde, et le lieu aime se caler dans les fosses ou derrière les obstacles. Le lieu n'est pas un prédateur pélagique, au contraire du maquereau, il ne nage pas en permanence à la recherche des bancs de petits poissons. Certes, il arrive de le rencontrer au beau milieu de la colonne d'eau, lors de ses déplacements entre les postes ou pour la reproduction. Mais c'est surtout près des fonds encombrés qu'on le rencontrera, là où il peut consommer une grande variété de poissons, mais aussi d'autres proies comme les crustacés et les céphalopodes.

Les macareux sont comme les lieus des grands consommateurs de lançons
Les macareux sont comme les lieus des grands consommateurs de lançons

Un prédateur opportuniste
Ce prédateur est partiellement piscivore, et la liste des poissons trouvés dans les contenus stomacaux contient, entre autres, le tacaud, le hareng, le sprat, le chinchard, le gobie et le lançon. Mais il ne s'arrête pas aux poissons, il apprécie également les crabes, les crevettes, et même les céphalopodes.

On comprend mieux ses préférences pour un habitat rocheux. Souvent tapis dans les laminaires, le lieu a toutes les proies de son spectre alimentaire à disposition.

Alors qu'un maquereau ou un chinchard va explorer toute la colonne d'eau sans relâche, le lieu jaune, plus patient, attendra dans ses postes le moment opportun, le banc de poissons-fourrage qui passe à portée.

Plusieurs millions d'oeufs
Comme la répartition du lieu jaune va des zones tempérées jusqu'à des zones franchement froides, sa reproduction a lieu à différentes périodes de l'année selon la région considérée. Elle peut commencer très tôt, dès février, pour les populations du golfe de Gascogne, mais beaucoup plus tard, en mai, pour la Norvège. Une des particularités de la reproduction des Gadidés, et le lieu jaune ne fait pas exception, est la production par les femelles d'un nombre très important d'oeufs, jusqu'à plusieurs millions pour un beau spécimen. Ces oeufs sont de petite taille (environ 1 mm) et pélagiques, ce qui signifie qu'ils sont déversés en pleine eau et flottent librement dans la colonne d'eau. Après la résorption de la vésicule vitelline et une phase planctophage, les juvéniles rejoignent le fond et adoptent le régime alimentaire et le mode de vie de l'adulte.

Confusions possibles

Pollock est le nom anglais du lieu noir
Pollock est le nom anglais du lieu noir

Le lieu jaune (Pollachius pollachius) et le lieu noir (Pollachius virens) sont étroitement apparentés et se ressemblent fortement.
Certes, le lieu noir possède, comme son nom l'indique, une coloration beaucoup plus sombre. Mais pour être sûr de les différencier, il vaut mieux remarquer que la ligne latérale du lieu noir est surlignée d'une bande blanche et fine mais très visible. La ligne latérale du lieu jaune, elle, n'est pas surlignée.

Ceux qui veulent aller encore plus loin dans l'anatomie pourront remarquer que le lieu noir possède un très léger barbillon mentonnier, faiblement proéminent.

Attention de ne pas confondre un juvénile de lieu jaune avec un merlan. La silhouette se ressemble, mais le merlan possède un museau proéminent et une tache noire à la base des pectorales.

Pêche

Tout l'intérêt de la pêche du lieu jaune est de trouver les beaux spécimens qui, hélas, se font de plus en plus rares. Comme tous les poissons de mer, le lieu jaune est surpêché, et les pêches mémorables qui se pratiquaient voici seulement 10 ans sont de plus en plus rares.

De nos jours, même lorsqu'on se rend en bateau sur des plateaux rocheux à plusieurs kilomètres des côtes, on prend majoritairement des lieus de 500 g à 1,5 kg, alors que les spécimens de 3 à 4 kg y étaient fréquents autrefois.

Les pêcheurs qui arrivent à tirer leur épingle du jeu ont souvent des bateaux bien motorisés et se rendent sur les épaves du large, où prendre un lieu de 10 kg n'est pas du domaine du rêve.

Son mode de vie le rend facile à localiser, du moins pour le pêcheur qui sait lire les postes, grâce aux courants ou directement sur son sondeur. Lorsqu'on se trouve sur un plateau rocheux, il faut localiser un sommet, et se laisser dériver en arrière. Il est alors bien rare de ne pas piquer quelques lieus.

Lorsqu'on est sur une épave, tous les obstacles sont susceptibles d'abriter des gros spécimens, mais la pêche y est beaucoup plus hasardeuse.
Tous ceux qui plongent sur les épaves vous diront qu'ils rencontrent des lieus énormes, parfois très profondément dans la structure. Les gros spécimens sont bien là, mais très difficile à déloger.

Pour le pêcheur, toutes ses observations biologiques ont une conséquence évidente : rasez le fond ! Que ce soit à la dandine ou à la traîne, les lieus rechignent à venir poursuivre une proie entre deux eaux, et vous devez aller le chercher dans son repère. Combien de fois ai-je vu des pêcheurs traîner un anguillon en caoutchouc à mi-eau et s'étonner de ne rien prendre. Lorsque l'on pêche en traîne, le pêcheur doit pouvoir toucher le fond régulièrement avec son plomb-poire pour être sûr que son anguillon, 20 brasses plus loin, passe à la bonne hauteur.

Dans des grands fonds et des courants puissants, cela impose l'utilisation d'un plomb de 2 kilogrammes, et tant pis pour les ampoules aux doigts. Pour le pêcheur à la cuiller ondulante, au jig ou au leurre souple, utiliser des leurres lourds est également indispensables dès que les conditions deviennent un peu difficiles, notamment quand le courant est soutenu et qu'il faut malgré tout dandiner à proximité du fond. Dans tous les cas, la recherche se doit d'être minutieuse et calculée, on doit explorer les cassures, les obstacles derrière lesquels les lieus peuvent se loger.

Carte d’identité du lieu jaune

Classe des Ostéichtyens (les poissons osseux)
Ordre des Gadiformes
Famille des Gadidés
Pollachius pollachius

Article réalisé Arnaud Filleul et Jean-Pierre Fleury.

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Mots clés :poissons