Le goujon dans notre histoire et notre culture
Histoire du goujon
C'est bien sûr l'image d'une pêche au coup amusante, parfois familiale, qui a donné l'expression taquiner le goujon.
Qui va encore taquiner le goujon actuellement ?
Ce petit poisson à l'allure si sympathique, et délicieux en friture, peut être recherché par des pêcheurs de tous âges. Mais c'est une technique de pêche pour toutes les générations, qui paradoxalement, et malheureusement, a presque disparu de nos jours. Les pêcheurs sportifs préfèrent les espèces plus combatives, les familles ne sortent plus guère dans la nature pour pêcher, et les jeunes enfants ont d'autres activités.
Il y a bien quelques irréductibles pour goûter les joies de la pêche en eau claire, mais ils sont de moins en moins nombreux.
La pêche à la bouteille
Il y a encore peu de temps le catalogue Manufrance proposait une bouteille "spéciale goujon".
Il suffisait de placer ce piège, sans avoir besoin du moindre appât à l'intérieur, au bon endroit de la rivière pour que les petits poissons viennent s'y abriter du courant. Pour faire une bonne pêche seule l'orientation était importante. Le cul de la bouteille par où les goujons rentrent doit être placé en aval du courant et non pas en amont comme on pourrait le croire.
Depuis le catalogue Manufrance n'existe plus et pêcher à la bouteille est devenu du braconnage.
C'est maintenant plutôt par le biais de l'environnement que l'homme peut avoir un impact sur le goujon. Ce petit poisson ne tolère pas l'eutrophisation, il a besoin de rivières sans vase. Pour cette raison, les populations de goujons fluctuent avec la qualité très changeante des rivières de France. On parle très peu, de nos jours, de la qualité de nos rivières. Tous les enjeux écologiques sont maintenant à un niveau planétaire, avec le réchauffement et les OGM. Pourtant, tous ceux qui passent du temps près des rivières savent que la qualité des cours d'eau est très hétérogène, et que lorsque la situation s'améliore sur une rivière, elle se dégrade sur une autre. Alors, les bancs de goujon sont condamnés à régresser puis à se reprendre, puis à régresser encore, dans l'indifférence générale.
Etymologie
Le nom commun goujon comme le nom scientifique Gobio gobio viennent du latin gobio. Attention avec l'origine gobio, il faut ne pas confondre le goujon et le gobie, deux poissons certes petits, un peu ressemblants, et vivants sur le fond, mais appartenant à des familles totalement différentes.
Les homonymes
Le terme goujon désigne également un clou ou une cheville.
Une goujonnette est un petit filet de sole ou de limande taillé en biais et frit.
Une perche goujonnière est un poisson de la famille des percidés : la grémille.
Les synonymes
Il est parfois appelé gouvin ou gouvion (toujours de l'origine gobio) mais les gros spécimens sont aussi appelés tourets.
Où rencontrer des goujons ?
Le goujon est présent pratiquement partout en France, mais pas dans toutes les portions de rivière. On le trouve en général dans la portion médiane des rivières et ruisseaux, ce qu'on appelle la zone à barbeau, mais il peut aussi se trouver en fin de zone à truite et en début de zone à brème. Dans certains étangs alimentés par un ruisseau, il arrive que les goujons soient présents en nombre à l'arrivée du ruisseau. Trouver des goujons est donc plus une question de biotope approprié que de zone géographique.
Le goujon est un indicateur de la qualité des eaux, trop de pollution et il est un des premiers à disparaître.
La pêche du goujon
La pêche du goujon mérite sa réputation, elle est vraiment amusante. La touche de ce petit poisson est franche et lorsqu'on a trouvé le banc, les prises se succèdent sans mal. Il mord bien au vers de vase, au fifise et au morceau de lombric. Mais attention, même si le goujon attaque flanchement les appâts, il faut soigner la présentation. Tout d'abord, on prendra soin de présenter l'esche à la bonne profondeur : tout près du fond ou mieux, traînant légèrement sur le fond. Le goujon ne montera pas dans la colonne d'eau pour prendre l'appât, il faut lui présenter devant le nez. Le montage devra prendre en compte la petitesse de la bouche, on utilisera un hameçon numéro 22 monté sur un bas de ligne en 8 centièmes. Pour le reste, la pêche est ludique. Et le goujon est un fier combattant qui se rend qu'après une belle défense et souvent en grognant sa réprobation.
La pêche à la coulée
Cette pêche s'appelle aussi pêche à trousse-culotte ou pêche à la marouille.
On descend dans la rivière ou le ruisseau, et on pêche en laissant couler vers l'aval, avec une canne toute simple, qui n'a pas besoin d'être longue. On doit gratter le fond avec ses pieds pour remuer et soulever les sédiments. Les goujons viendront vraiment fouiller au pied du pêcheur, ce n'est pas une légende. Ils sont attirés par tous les petits invertébrés qui sont délogés du substrat lorsque ce dernier est remué par le pêcheur.
Quelques conseils pour la friture
La grande question est faut-il vider ou pas vider les goujons. La réponse est dans le conseil suivant : choisissez pour vous régaler les sujets les plus petits, le problème ne se posera plus tant il est évident qu'il ne sert à rien de les vider. Si vous en pêchez des gros remettez-les à l'eau, ils feront d'excellents reproducteurs.
Séchez bien vos poissons avant de les mettre, par petites fournées, dans une huile bien chaude et bien propre. Un peu de sel, pas de citron (le citron tue le poisson) est vous régalerez d'un plat simple et digne des plus grandes tables. Rien à voir avec les pauvres fritures des "Auberges du Lac" servies en boules informes et à peine décongelées.
Article réalisé par Arnaud Filleul et Jean-Pierre Fleury.