Le désordre, une malédiction, vraiment ?
Face aux exhortations de votre directeur ou de votre chef de service vous invitant à ranger votre bureau, vous êtes finalement parvenu à ordonner votre espace de travail. Mais rien n'y fait : au bout de quelques jours, le capharnaüm a finalement repris sa place. Et si celui-ci n'était pas une fin en soi mais plutôt une caractéristique vous permettant d'améliorer votre qualité de travail et/ou votre productivité ?
Le professeur de management Eric Abrahamson, de l'université de Columbia, a rédigé il y a peu une étude controversée s'intitulant "Théorie de la désorganisation et comportement désorganisationnel : vers une étiologie des désordres". Un titre qu'il a notamment repris de manière bien plus parlante dans son livre "Un peu de désordre = beaucoup de profit(s)", traduit dernièrement chez Flammarion. À travers ce dernier, Abrahamson détaille les différents types de désordre qu'il a pu observer au cours de ses recherches. Résultat : il conclut qu'un employé désordonné peut se révéler à la fois plus productif, plus astucieux et plus efficace que ses collègues les plus maniaques.
Le désordre, une forme particulière d'ordre ?
Pour mieux faire comprendre sa remarque, Abrahamson invite à considérer le désordre comme une forme particulière d'ordre, bien plus personnelle et bien souvent beaucoup plus fructueuse. Ainsi, le fait de ne pas perdre de temps à réorganiser son espace de travail ou à se lever pour ouvrir et fermer une armoire induit une meilleure productivité car le salarié peut consacrer tout son temps à sa mission. En moyenne, selon l'étude d'Abrahamson, un salarié désordonné passerait 36 % moins de temps que ses collègues à remettre la main sur les documents nécessaires. Entassés devant lui, ces derniers sont évidemment beaucoup plus accessibles.
Par ailleurs, l'enquête du professeur met en lumière qu'une personne hostile au rangement est bien souvent plus imaginative. Pourquoi ? Parce que cette dernière n'apprécie pas ce qui rentre dans les cases et préfèrent voir s'amonceler devant elle les documents et les informations les plus hétérogènes. Et les rapprochements d'idées qui en découlent peuvent donner lieu à des initiatives originales voire des apports majeurs. À noter qu'un certain Albert Einstein s'opposait vivement aux défenseurs de l'ordre de la manière suivante : "Si un bureau en désordre dénote un esprit brouillon, que dire d'un bureau vide ?"
Un peu de désordre pour davantage de réussite
Un autre argument avancé par Abrahamson mérite son pesant d'or : le fait d'être désordonné peut favoriser le statut d'une personne au sein d'une entreprise, en lui permettant notamment d'accélérer sa carrière. Il faut savoir que le cadre désordonné est bien souvent la seule personne à connaître l'endroit exact où l'on peut trouver les rapports et documents cruciaux qui lui ont été remis. Grâce à cet avantage, celui-ci parvient ainsi à se rendre indispensable à la bonne marche de l'entreprise.
Reste maintenant à savoir si les théories du professeur Abrahamson correspondent véritablement à la réalité. Une chose est sûre : ce désordre risque aussi de déranger votre chef ou vos collègues.
Sources : gsb.columbia.edu, Rue89, JournalDuNet, bouquin.hautetfort