Bien décidé à faire baisser le prix de l'optique, le gouvernement veut rendre un milliard d'euros de pouvoir d'achat aux ménages. Une décision mal vue par les entreprises, parmi lesquelles Optic 2000, qui redoute la perte de 16 000 emplois.
Prochainement, le prix de l'optique pourrait bien fléchir de 25 %. C'est en tout cas sur cette baisse que table le gouvernement, qui trouve injuste que les Français paient 50 % de plus que leurs voisins européens pour la même chose. Or, un amendement soutenu par l'exécutif veut mettre en place une plus grande ouverture du secteur de la distribution de verres et de lentilles, dans le cadre du projet de loi sur la consommation qui devrait être voté ce soir par les députés. Pour rappel, l'UFC Que Choisir, mais aussi la Cour des comptes, n'avaient pas hésité à pointer un marché peu concurrentiel et opaque pour les consommateurs.
Un coût moyen de 470 euros pour le consommateur
En admettant que le texte soit aujourd'hui voté tel quel, cela voudra dire que n'importe quel investisseur sera en mesure en 2014 d'ouvrir un magasin d'optique à condition qu'un salarié au moins soit diplômé d'optique. D'autre part, le texte devrait permettre aux ophtalmologues de préciser sur l'ordonnance, en sus des valeurs de correction améliorant la vue, l'écart pupillaire – une information qui freinait jusqu'alors le développement de la vente de lunettes en ligne. Résultat : une porte ouverte pour les acteurs tels que Sensee ou Happyview.
Selon une déclaration du ministre délégué à la Consommation, Benoït Hamon, cette vente par internet de lunettes et de lentilles engendrerait un milliard d'euros de pouvoir d'achat aux ménages. Un rapport de l'UFC-Que Choisir montrait récemment qu'un équipement d'optique représente un coût moyen de 470 euros pour le client, tandis qu'il revient à 112 euros à l'opticien. Tant et si bien que ces marges auraient permis en l'espace de dix ans de financer deux fois plus de magasins, autrement dit 11 500 en France.
Les effets de la vente en ligne sur le marché
Toutefois, les opticiens sont contre ce projet. Pour le directeur d'Optic 2000, Didier Papaz, ces décisions entraîneraient rapidement la perte de 16 000 emplois et une baisse de marché de 16 %. Du côté de Bercy, l'on considère que le développement de la vente en ligne ne devrait pas cannibaliser les magasins d'optique, en soulignant que trois millions de Français ne pouvant s'acheter de lunettes pourraient désormais en profiter. Même si la vente en ligne devrait à terme représenter 5 à 10 % du marché, d'après les observateurs, les magasins physiques ne fermeront pas pour autant, estime Marc Simoncini, le PDG de Sensee.
Du côté de l'UFC-Que Choisir, le chargé de mission santé Mathieu Escot juge que c'est une bonne nouvelle, mais qu'il est encore possible de faire mieux. Par exemple, celui-ci estime qu'il est nécessaire d'autoriser les mutuelles santé à rembourser davantage leurs adhérents lorsque ces derniers passent par des professionnels agréés par le biais de réseaux de soins. Ces réseaux de soins font en effet bénéficier de tarifs 20 à 50 % moins cher que les tarifs classiques de l'optique, d'après un rapport de l'inspection générale des affaires sociales (Igas).
Sources : UFC-Que Choisir, Igas, 20minutes