À en croire la DGCCRF et la CNIL, l'IP tracking n'existe pas. Pourtant, dans les faits, les variations de prix sont monnaie courante sur internet lorsqu'il s'agit par exemple de réserver un billet d'avion ou de train. Mais dans ce cas, comment expliquer ce phénomène et peut-on vraiment parler d'IP tracking ?
Admettons que vous souhaitiez réserver un billet Paris-Rome, à 74 euros, sur une compagnie aérienne précise, mais qu'au moment de payer, vous ayez un doute et préfériez comparer les prix des autres offres. Pour vous en assurer, vous choisissez alors de vous déconnecter, mais un peu plus tard, lorsque vous retournez sur le site en question, le même billet est proposé à 90 euros. Conscient de la stratégie mise en œuvre par certains sites pour augmenter les prix, vous retentez la même chose depuis un ordinateur connecté sur un autre réseau et vous apercevez que le prix est toujours de 74 euros. Mais si l'IP tracking n'existe pas, de quoi s'agit-il ?
Pour rappel, l'IP tracking, entre autre composante du yield management, serait utilisé afin de laisser penser à l'internaute que les tarifs augmentent "naturellement". C'est en tout cas ce que certaines sources anonymes, en l'occurrence des internautes spécialistes de l'économie du tourisme, avaient indiqué au Monde début 2013.
Mais ce n'est pas tout, puisque le professeur de marketing à HEC Montréal, Jacques Nantel avait également expliqué dans le quotidien du soir que lorsqu'un internaute recherche un billet d'avion, la compagnie aérienne enregistre le lieu de départ et d'arrivée sélectionné en l'associant à son adresse IP, et ce quel que soit le terminal. Et d'ajouter que si ce même internaute revient plus tard, le prix proposé sera supérieur pour faire croire que les places diminuent et ainsi favoriser l'achat. Pour contourner l'IP tracking, Pratique.fr avait alors identifié pour vous 7 astuces, la meilleure solution étant de faire une simulation sur un terminal spécifique, et ensuite de réaliser l'achat sur un autre.
Pas d'"IP tracking", mais des variations bien présentes
Dans le sillage de ce phénomène, une députée européenne avait demandé l'avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) sur la question, qui avait ensuite mené l'enquête avec la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Or, le résultat, publié le 27 janvier, est étonnant puisque ces derniers indiquent, contrôle à l'appui des sites de e-commerce en matière de modulation des prix de vente, qu'aucune pratique de modulation des prix affichés selon l'adresse IP de l'internaute n'a été identifiée. Cependant, d'autres pratiques de modulation des prix ont été mises en évidence.
C'est notamment le cas du nombre de places offertes ou restant dans le moyen de transport concerné. Une pratique qui amène à faire varier le tarif d'un billet en fonction de la date de son achat ou du taux de remplissage. Par exemple, du côté de la SNCF, plus le train est plein, plus les prix grimpent. Un trajet Paris-Marseille est ainsi proposé à 25 euros sur un nombre de places restreint, trois mois à l'avance. Ensuite, les tarifs montent, jusqu'à atteindre plus de 90 euros, à mesure que la date du départ approche. Une stratégie transparente, puisque la SNCF la détaille sur son site internet.
Des frais de dossier qui varient selon l'heure
La DGCCRF et la CNIL on en outre remarqué que le prix des frais de dossier variait en fonction de l'heure à laquelle l'internaute réalise son achat ou sa réservation. De fait, celui-ci profite de frais plus intéressants quand il achète un billet pendant les heures creuses, définies par l'e-commerçant.
Une variation de prix en fonction du site internet consulté dernièrement
Un internaute venant d'utiliser un comparateur de prix va bénéficier d'un prix d'appel plus attractif qu'un autre, mais ses frais seront plus importants, bien que cela n'influe pas significativement sur le prix global. Le problème, selon la CNIL et la DGCCRF, est que ce type de pratique peut jouer un rôle décisif sur le comportement du consommateur, dans la mesure où l'information fournie est en réalité altérée.
L'IP tracking n'existe pas, oui mais…
Certes, l'enquête menée par la CNIL et la DGCCRF ne permet pas de prouver mais plutôt d'infirmer la thèse de l'IP tracking. Mais pour autant, pourquoi le prix est-il automatiquement plus élevé quand on fait la même recherche sur le même ordinateur, et pas sur un autre ? Mystère. Reste maintenant à savoir quels sont les sites internet à avoir fait l'objet d'une étude par la CNIL et la DGCCRF…