Le gouvernement a décidé de supprimer l'unique jour de carence s'imposant aux fonctionnaires qui sont en arrêt maladie. Cette décision soulève de nombreuses critiques, notamment des salariés du privé qui sont eux soumis à trois jours de carence, mais aussi des représentants du patronat Laurence Parisot et de la fédération hospitalière française (FHF) Frédéric Valletoux, ainsi que des personnalités de l'opposition, à l'origine de cette mesure instaurée sous le gouvernement Fillon. En 2012, le jour de carence a dégagé 60 millions d'euros d'économies à l'Etat et 70 millions dans les hôpitaux.
Qu'est-ce qu'un jour de carence ? C'est une mesure prise par le gouvernement fin 2011, qui vise à limiter les dépenses de l'assurance-maladie, en faisant porter le coût de l'absence d'un salarié sur son propre salaire pour les premiers jours du congé maladie. C'est une espèce de franchise sur l'indemnisation de son absence pour cause de maladie, qui fait reculer le début de la prise en charge de l'assuré au 2e ou au 4e jour - selon qu'il y a 1 ou 3 jours de carence imposés - limitant ainsi à la fois la prise en charge des congés maladies de courte durée (d'un à 3 jours), et le recours des salariés aux absences justifiées par un certificat médical, car ils doivent supporter une partie du coût.
La suppression : une mesure qui fait couler beaucoup d'encre
Dans ce contexte d'économies tous azimuts, il peut apparaître contradictoire de mettre fin à une mesure qui permettait à la fois de dé-rembourser une partie importante des indemnités-maladie et d'inciter les salariés de la Fonction publique à ne prendre des congés qu'en dernière extrémité (bien qu'on ne dispose pas de chiffres précis, on estime que l'absentéisme à l'hôpital - par exemple - a baissé de 7 % du fait de ce jour de carence). Mais le ministère en charge de la Fonction publique a décidé que ce jour de carence était "injuste, inutile et humiliant" pour justifier son abrogation. "La suppression du jour de carence était une revendication unanime, tant des syndicats que de l'ensemble des fonctionnaires ", a déclaré Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT.
Au-delà de l'opposition entre public et privé, cette affaire révèle surtout l'inégalité croissante entre les professions défendues, en premier lieu desquelles les fonctions publiques (d'Etat, territoriale ou hospitalière) et les grandes entreprises ayant bénéficié d'accords de branches qui exonèrent les salariés de jour de carence d'un côté, et les PMI / PME (de moins de 50 salariés), qui sont très faiblement syndiquées et pour lesquelles les trois jours de carence sont incontournables, de l'autre côté. Les seconds, ne disposant pas de corps intermédiaires représentatifs, sont ceux qui ont le plus de mal à se faire entendre, et font ainsi les frais des politiques de réduction des déficits. Mais, plus grave, ce sont aussi ceux dont les conditions de travail justifient le plus les arrêts-maladies de longue et de courte durée, étant soumis à des contraintes plus fortes que ceux des autres secteurs professionnels.