Une mauvaise réputation qui vient de loin
Extraits du Roman de mes chemins buissonniers, J.P Fleury (Ed. du Rocher) :
"Loup y es-tu, m'entends-tu ? Le loup n'y est plus, s'il y était il nous mangerait !" Les loups se sont tus, la vie a bien changé depuis ces temps-là. Les dangers réels s'en sont allés avec la disparition des dernières meutes...
... A huit ans, les gamins, surtout les petites filles qu'en Sologne on appelait les drôlines, étaient "mis aux vaches". Ils passaient des journées entières seuls avec leurs troupeaux, à l'orée des bois, dans les bordes ou les essarts. Ils ne s'amusaient guère, loin de là. Tous savaient qu'un jour ou l'autre ils devraient défendre leurs génisses contre le loup. Leur imagination était sans cesse nourrie de récits terrifiants : un 21 juillet, Jeanne avait été mangée au quart. Le loup ayant été tué, on a retrouvé dans ses entrailles de la chair humaine ! Marie a été dévorée un 7 novembre et d'elle on n'a pu mettre en terre que ses intestins et quelques petits os. A Saint Ay, après le passage du loup, on ne put inhumer qu'un bras et une jambe d'un enfant de dix ans.
Ces quelques procès-verbaux ont été trouvés et collationnés, comme beaucoup d'autres par Jacques Baillon pour le compte des Naturalistes de l'Orléanais. Ni lui, ni cette association ne peuvent être soupçonnés d'avoir instruit à charge contre le loup. Au contraire, au fil des lignes, ils le décrivent comme "la première victime de marque de la longue agonie de la faune sauvage".
Il est impossible de nier que le loup ignore en toute circonstance la proie facile que peut représenter un enfant ou un homme affaibli. Mais il convient de noter que la plupart de ces méfaits furent commis à l'occasion de circonstances exceptionnelles, famines, grands froids. Pendant les périodes qui suivent les guerres, les loups prolifèrent. Ils charognent sur les champs de batailles et du fait de ce surcroit de nourriture, leurs portées sont nombreuses. Dans des circonstances normales le loup aurait plutôt tendance à fuir l'homme, son plus fidèle ennemi.
Impact des loups sur l'élevage
La bataille des chiffres fait rage ! Le ministère de l'Environnement estime à 2 800 ovins tués en 2002 ; 2 000 en 2003. Le WWF, quant à lui, conteste l'impact des loups en attribuant la plupart des attaques aux chiens errants... Les bergers ne sont pas d'accord !
Les éleveurs sont largement dédommagés mais avancent un argument de poids : je ne sélectionne pas mon cheptel pour qu'il se fasse "bouffer" par le premier loup venu.
Symbole
Il est inutile de préciser que le loup tient le rôle du méchant dans l'imaginaire collectif occidental. Aujourd'hui encore les fables enfantines continuent de dresser un portrait du loup sans équivoque : un animal méchant, fourbe et vindicatif que l'on doit absolument tuer pour assurer sa propre sécurité. La place de cet animal dans notre culture est donc tout à fait spéciale.
La Fontaine
"Il n'y a rien de bon dans cet animal, que sa peau" dans la fable Le Loup et le chien. (Jean de La Fontaine, fables : Le Loup et l'agneau ; Le Loup et le chien ; Le Loup plaidant contre le renard par-devant le singe ; Le Loup devenu berger ; Le Loup et la cigogne ; Le Loup et les brebis ; Le Loup et le chien maigre)
Buffon
"Désagréable en tout, la mine basse, l'aspect sauvage, la voix effrayante, l'odeur insupportable, le naturel pervers, les moeurs féroces, il est odieux, nuisible de son vivant, inutile après sa mort".
Hobbes
L'homme est un loup pour l'homme, sentence généralement attribuée à Thomas Hobbes, Le Léviathan, 1660. En fait, son auteur est Plaute, qui a été repris par Montaigne, puis par Hobbes.
Expressions
"Il fait un froid de loup" : un froid rigoureux.
"Manger comme un loup" : manger beaucoup.
"Marcher à pas de loup" : marcher sans bruit et à dessein de surprendre.
"Connu comme le loup blanc" : se dit d'une personne ou d'une chose connue et reconnue ou d'un lieu commun.
"Avoir vu le loup" : en parlant d'une fille, exprime qu'elle a eu des "galanteries".
"Hurler avec les loups" : participer à des critiques ou à des attaques contre quelqu'un sans réfléchir, en suivant ce qui semble être l'opinion commune.
"Savoir la patenôtre du loup" : savoir certaines paroles prétendues magiques pour empêcher que le loup ne tue des brebis.
"Se mettre dans la gueule du loup" : courir naïvement vers un danger.
"Le loup mourra dans sa peau" : il arrive rarement qu'un méchant homme s'amende.
"La faim chasse le loup hors du bois" : la nécessité fait faire aux gens des choses contre leur inclination.
"Marcher à la queue leu leu" : “leu” en vieux français signifie “loup”. Les loups ont l'habitude de marcher les uns derrière les autres, chacun avançant dans les empreintes de celui qui le précède.
"Quand on parle du loup, on en voit la queue" : se dit lorsqu' un homme survient au moment où l'on parle de lui.
"Un jeune loup" : c'est un jeune homme qui veut réussir et qui est prêt à tout pour y arriver.
"Faire un loup" : faire un travail qui ne peut pas servir, s'appliquer.
"Une louve" : une femme très adonnée à la débauche...
"Un loup de mer" : un vieux marin aguerri.
"Dent de loup" : gros clou avec lequel on fixe les poteaux d'une cloison.
"Tête de loup" : grand manche de bois terminé par un balai rond, qui sert à nettoyer les plafonds.
Homonymes
Loup : Terme d'atelier. Défaut capital dans une pièce de bois.
Loup : Espèce de masque de velours noir que les femmes ont porté pendant quelque temps pour se préserver du hâle. Il n'était point attaché, et elles le tenaient avec un bouton dans la bouche, ainsi dit parce qu'il faisait peur aux petits enfants.
Loup au théâtre : quand la scène reste vide dans le cours d'un acte.
Loup : nom du bar en Méditerranée.
Le saviez-vous ?
Le chien domestique est le plus proche parent du loup. Tous les animaux de l'espèce Canis Lupus auxquelles appartiennent le chien et le loup sont interfécondes. Ainsi au cours des siècles, les chasseurs ont souvent croisé des loups avec leurs chiens pour leur redonner de l'endurance et de la passion.
Il n'existe qu'une seule race de chien capable de braver les attaques de loup c'est le chien de montagne des Pyrénées ou Patou. Utilisé en France jusqu'à la fin du XIXe siècle, il a peu à peu disparu de nos campagnes avec la raréfaction des grands prédateurs (ours, loups, lynx).
Le terme de "pastou" (prononcer : patou), dérivé du mot "pastre" = berger en vieux français, désigne donc un chien de berger comme on l'entendait dans les temps anciens.
Le retour naturel du loup dans le Mercantour et la réintroduction de l'ours dans les Pyrénées centrales ont suscité un regain d'intérêt pour ce type de chien.
Attention car l'irruption de tout élément étranger au troupeau (animal sauvage, chien non tenu en laisse, promeneur, VTT...) peut troubler la quiétude du troupeau, perturber sa bonne marche et le travail du berger : elle met donc le chien de protection en alerte. A votre approche, le patou vient alors vous flairer pour vous identifier. Après quoi, il regagne son troupeau. Parfois il peut aussi tenter de vous intimider. Si vous croisez un troupeau, contournez largement l'aire de pâturage ou de repos des brebis : vous respectez ainsi le travail des bergers sans perturber les animaux.
Tous les autres chiens ont une peur viscérale du loup et s'éloignent à son contact.
Des études récentes réalisées en Espagne où la population de loups est toujours en expansion ont montré à partir d'individus équipés de balise radio que ces animaux vivent à proximité de l'homme, qu'ils traversent sans difficultés et fréquemment les autoroutes et qu'il n'est pas impossible de les voir dans les villes...
Ces découvertes laissent penser que l'expansion du loup en France n'est pas prête de s'arrêter.
Où observer le loup ?
Dans les départements où ils sont présents, peu de personnes ont vu les loups. Ces gens, des professionnels de la montagne passent leur vie entière loin des zones fréquentées par l'homme. Ainsi on peut dire que la probabilité pour un amateur de voir un loup dans un espace sauvage est quasiment nulle en France.
Il existe cependant des espaces clos dans lesquels il est possible de voir des loups et que nous pouvons recommander.
Parc animalier
Loups du Gévaudan
Étymologie
Du latin lupus.
En grec lukos.
En espagnol lobo.
En anglais wolf.
En italien lupo.
En allemand Wolf.
En hongrois farkas.
En breton bleiz.
Article réalisé par Jean-Pierre Fleury.