Incarcération : un cas de force majeure ?
Lorsque le salarié se retrouve en prison, le contrat de travail est considéré comme « suspendu » (comme pour un arrêt de travail pour maladie, congés payés...).
L’employeur ne peut pas « utiliser » cette incarcération pour prononcer la rupture du contrat de travail, cela ne représente pas un cas de « force majeure ».
Cour de cassation 15/10/1996, arrêt 93-43668
Incarcération : assimilable à une démission ?
De la même façon, l’employeur n’est en aucun cas autorisé à considérer cette mise sous écrous comme une démission.
- l’employeur ne peut pas supposer que le salarié qui se trouve en prison exprime sa volonté de démissionner (Cour de Cassation 30/10/1996 (arrêt 94-41038)) ;
- un salarié en prison qui rédige (sans contrainte bien entendu) une lettre de démission sur son lieu d’incarcération permet à l’employeur d’en prendre note et de considérer que le contrat de travail est rompu par le salarié.
Information par le salarié
Le salarié, ou un tiers, doit informer l’employeur de l’incarcération du salarié.
Le défaut d’information peut représenter un motif de licenciement, pour « manquement du salarié à ses obligations de prévenance ».
La cour de cassation dans un jugement du 30/04/1987, avait en effet considéré que le licenciement prononcé pour ce motif était licite.
Salarié en prison : quelles implications ?
Perte de confiance ?
Parmi les motifs que l’entreprise peut utiliser pour notifier un licenciement, il en existe un qui se nomme « la perte de confiance ».
La Cour de cassation a jugé le 29/05/2001 (arrêt 98-46341) que l’incarcération ne permettait nullement de motiver un licenciement pour « perte de confiance », quand bien même dans le cas ou elle repose sur des éléments objectifs.
Licenciement pour faute lourde ?
Le fait qu’un salarié soit en détention, relève en effet d’un acte du domaine privé.
Ce n’est en aucun cas une faute disciplinaire, le licenciement pour faute lourde n’est pas envisageable et serait requalifié en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Licenciement totalement impossible ?
L’employeur peut notifier un licenciement en lien avec l’emprisonnement du salarié pour des cas bien « encadrés », parmi lesquels nous pouvons citer :
- la longue incarcération du salarié créé de graves perturbations au sein de l’entreprise (Cour de cassation, arrêt 09/01/2008 06-44981 FD) ;
- l’emprisonnement du salarié entraîne de profonds retentissements sur la réputation de l’entreprise (Cour de cassation, arrêt 25/01/2006 04-44918 BC V) ;
- le salarié étant en prison pour une longue durée, son remplacement définitif est obligatoire (Cour de cassation, arrêt 25/04/2001 98-43814 FD).
Procédure de licenciement
L’employeur doit veiller au respect de la procédure de licenciement, à savoir :
- l'envoi d'une lettre de convocation à l’entretien préalable (à adresser au domicile du salarié), dont un double peut aussi être envoyé à la prison où se trouve le salarié ;
- le salarié doit bénéficier de l’indemnité de licenciement légale (ou conventionnelle) ;
- l’indemnité compensatrice de préavis n’est pas à verser compte tenu de la situation « particulière » du salarié (jugement de la Cour de cassation du 17/12/1984, arrêt 82-42652) ;
- en revanche, l’indemnité compensatrice de congés payés doit être versée.
Sortie de prison
Si le salarié sort de prison et ne reprend pas le travail, un licenciement pourra être prononcé pour abandon de poste.