Partout dans le monde
Quel que soit le continent considéré, les Suidés comptent des animaux hors-norme. On trouve en effet des Suidés étonnants presque partout dans le monde : sanglier en Eurasie, phacochère en Afrique, Babiroussa en Indonésie. De plus l'homme a très largement introduit le sanglier, et le cochon domestique, au rythme de ses migrations en Amérique du Nord, Nouvelle-Zélande et Nouvelle Guinée.
Le groin et les autres caractéristiques
Les Suidés se reconnaissent à de nombreux caractères anatomiques dont l'un des plus remarquables est le museau mobile (le groin), portant un disque cartilagineux et glabre à son extrémité ainsi que deux narines terminales.
L'odorat est le sens le plus développé de ces animaux.
Les Suidés se distinguent également par leur corps trapu, leur peau épaisse et leur pelage irrégulier, parfois éparse. Les poils (ou soies) sont épais et drus.
Les yeux sont petits et placés très haut sur le crâne, les oreilles sont de taille moyenne.
La forme ramassée de ces animaux est notamment la conséquence du grand développement de la crête supra-occipitale, responsable de la forme caractéristique du crâne. En revanche, les pattes sont plutôt grêles et courtes.
Les mâchoires sont une autre partie du corps très transformées, avec des variations importantes d'une espèce à l'autre, comme les canines perforantes du spectaculaire babiroussa (Babyrousa babyrussa).
Les canines des Suidés sont particulièrement fortes chez les mâles. Appelées défenses (mâchoire inférieure) et grès (mâchoire supérieure), ces dents sont des trophées appréciés des chasseurs de sanglier. Leur croissance est continue et elles s'affûtent par frottement les unes contre les autres. Les molaires sont bunodontes, ce qui signifie que les cuspides forment des collines.
Enfin, notons la présence de 4 doigts à chaque patte, un doigt ayant disparu au cours de l'évolution de ces animaux. Seuls les sabots des doigts III et IV portent le corps, les doigts II et V (beaucoup plus réduits et que l'on appelle les gardes pour les sangliers), ne touchant que faiblement le sol (cette configuration offrant un empreinte facile à reconnaître).
Une vie en groupe
L'écologie des Suidés est aussi variable que la répartition des différentes espèces. Ces animaux se sont adaptés à une multitude d'écosystèmes et de climats. Plaines, steppes, savanes, forêts et même zones cultivées, voici quelques exemples des environnements susceptibles d'abriter des Suidés. Ce sont des animaux sociables vivant en couple ou en groupes familiaux, les vieux mâles étant cependant solitaires. Ils peuvent se regrouper en hardes ou compagnies plus volumineuses quand la recherche de nourriture le justifie.
Tous les Suidés sont omnivores, avec cependant une consommation prépondérante de végétaux. Les denrées consommées incluent les champignons, les feuilles, les racines, les bulbes, les tubercules, les fruits, les escargots, les vers de terre, les petits vertébrés et les charognes. L'odorat est primordial dans la recherche de la nourriture et la reconnaissance des individus, la vue étant plutôt mauvaise.
Les grognements, et toute une gamme de sons, contribuent à la communication de ces animaux. La période de reproduction provoque de spectaculaires combats chez les mâles qui usent au mieux de leurs défenses. La durée de la gestation étant en moyenne de 4 à 5 mois, on observe 1 à 2 portées par an selon les conditions du milieu, notamment la disponibilité de la nourriture. La portée comprend de 2 à 14 petits, au pelage caractéristique, rayé ou moucheté, très différent de celui des adultes. En général, les femelles font un nid, appelé chaudron pour les sangliers, en évidant légèrement le sol et en le recouvrant d'herbes sèches et de brindilles. Certaines espèces, comme le phacochère, peuvent également utiliser des termitières abandonnées. Les petits sont presque immédiatement capables de marcher, résultat de la sélection naturelle dans des milieux où les prédateurs de juvéniles sont nombreux.
La classification
La famille des Suidés compte trois sous-familles : les Babyrousinés, groupe du curieux babiroussa (voir plus bas), les Phacochoerinés, groupe du Phacochère et les Suinés qui comprennent l'essentiel des espèces avec notamment le sanglier, le potamochère (Potamochoerus porcus) et l'hylochère (Hylochoerus meinertzhageni), le géant de la famille.
Le nombre de 16 espèces pour cette famille est âprement discuté par les différents auteurs car les variations géographiques sont très fortes, certains proposant de donner le statut d'espèces à ce que d'autres reconnaissent comme des sous-espèces.
Le potamochère, joli animal africain de couleur rousse, ne compte ainsi pas moins de 13 sous-espèces pour certains auteurs. Hors de ces considérations très techniques, on est sûr d'une chose : tous les Suidés sont étroitement apparentés et la validité du groupe n'est jamais remise en cause. On dit d'un tel groupe, dont toutes les espèces sont issues d'un ancêtre commun, qu'il est monophylétique.
Les plus proches parents des Suidés sont les pécaris, leurs cousins un peu plus lointains étant les ruminants et les hippopotames. A titre d'information, on connaît des espèces fossiles apparentées aux Suidés actuels et datés de 50 millions d'années. Ce groupe tire donc son origine d'une époque très ancienne.
Le sanglier
On considère que le sanglier est le Suidé présentant le plus de caractères anatomiques primitifs alors que le babiroussa fait partie des espèces extrêmement modifiées par rapport à l'état ancestral.
La relation entre l'homme et le sanglier est loin d'être nouvelle puisque les premières domestications remontent à 9000 ans avant J-C.
Le porc domestique est directement issu de l'élevage de sanglier (d'une sous espèce vivant en Mésopotamie), par sélection humaine. Outre la domestication, le sanglier a été introduit dans de nombreux pays dans le but de développer la chasse, mais les répercussions écologiques ont été inégales, avec des effets néfastes répertoriés.
Depuis porcs domestiques et sangliers n'ont pas cessé de se croiser et de se décroiser. Ces allers et venus ont mélangé les caryotypes des sangliers sauvages en hybridant les sous-espèces européenne et moyenne-orientale et en donnant des individus étranges appelés au gré de la fantaisie cochongliers ou sanglochons.
L'extraordinaire babiroussa
Babyrousa babyrussa n'est pas un animal élégant mais il est vraiment extraordinaire. Ce Suidé dodu aux pattes fines n'existe que dans quelques îles indonésiennes, un remarquable exemple d'endémisme. Les canines supérieures des mâles ne poussent jamais vers l'intérieur de la bouche mais se dirigent au contraire vers le haut, transperçant le museau et se dirigeant vers l'arrière. Ces dents exubérantes peuvent atteindre 30 centimètres. Parfois un vieux mâle meurt à cause de la croissance de ses défenses qui finissent par lui entamer la boite crânienne. Outre sa morphologie, les moeurs du babiroussa sont spécialisées : c'est un animal diurne, mangeant principalement des feuillages, de champignons et des fruits tombés à terre. Il semble peu se servir de son groin, au contraire des autres Suidés. Il s'agit donc d'une espèce très spécialisée, ce qui est assez fréquent chez les animaux endémiques.
Ces animaux étaient considérés comme disparus du monde sauvage. C'est Maurice Patry, un naturaliste et aventurier français qui, après force expéditions en Asie a prouvé la pérennité de leur existence dans les forêts profondes de l'Indonésie.
Les pécaris
Les pécaris n'appartiennent pas à la famille des Suidés, ce sont des Tayassuidés.
Les pécaris se rencontrent depuis le sud des Etats-Unis jusqu'en Argentine. Ils sont très étroitement apparentés aux Suidés et présentent une morphologie et des moeurs très proches. C'est tellement vrai que certains trouvent le classement en deux familles inutile, et préféreraient voir une seule famille composée de deux sous-familles.
Dans tout cochon y aurait-il un homme qui sommeille ?
Le cochon est certes un mammifère, ce n'est cependant pas l'animal le plus étroitement apparenté à l'homme, l'ensemble des primates, par exemple, sont des cousins plus immédiats de l'homme.
Cependant, le cochon présente des similarités avec l'homme qui lui ont valu un usage médical, mais ces similarités sont issues de phénomènes de convergence.
La taille et la configuration des organes des cochons, et l'anatomie en général, permettent des comparaisons et des utilisations immédiates (possibilités de greffes,) en médecine, notamment en cardiologie. Idem pour la peau de cet animal, qui comme la nôtre peut prendre des coups de soleil. Les brûlures liées aux explosions atomiques ont ainsi été testées sur de malheureux cochons. Mais n'oublions pas l'autre raison de son succès dans les expériences médicales : C'est un animal d'élevage (à ne pas confondre avec le cobaye ou cochon d'inde qui est un rongeur) extrêmement facile à se procurer pour étudier sans risque de choquer l'opinion les grippes porcines et humaines...
Article réalisé par Arnaud Filleul et Jean-Pierre Fleury.