Prise d'acte de rupture du contrat de travail

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Prise d'acte de rupture du contrat de travail
Prise d'acte de rupture du contrat de travail
La prise d'acte de rupture du contrat de travail est un mode de rupture à part entière comme la démission ou le départ à la retraite. Ce mode de rupture peu utilisé auparavant connaît actuellement une utilisation en pleine croissance. Les jurisprudences qui en découlent se produisent de plus en plus fréquemment. Ce qui suit devrait vous permettre d'y voir plus clair.

Les principes de base

Seul le salarié peut utiliser ce mode de rupture du contrat, en notifiant à son employeur qu'il prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison d'agissements qu'il juge répréhensibles.

Ces agissements peuvent être :

  • attitude fautive de l'employeur (harcèlement, non respect de règles d'hygiène, etc.) ;
  • le non respect du repos hebdomadaire ou quotidien ;
  • le non-paiement d'heures supplémentaires ;
  • modification de la rémunération du salarié par l'employeur sans avoir obtenu l'accord du salarié ;
  • ...


La prise d'acte rompt immédiatement le contrat.

Il est à noter que la rupture du contrat s'impose à l'employeur (Cour cassation du 4 juin 2008), le salarié quitte l'entreprise sans avoir à effectuer un préavis.

Si une transaction n'est pas trouvée, le salarié (ou l'employeur) engage alors une procédure auprès du conseil des prud'hommes et c'est au juge qu'il incombera de savoir si cette prise d'acte de la part du salarié est conforme ou non.

Pour quels salariés ?

Seul le salarié en CDI peut utiliser ce mode de rupture. Les salariés en CDD sont donc exclus.

Un salarié titulaire d'un mandat protecteur (IRP Instances Représentatives du Personnel, représentant syndical) peut aussi prendre acte de la rupture de son contrat de travail.

A quel moment ?

Le salarié qui a été convoqué à un entretien préalable ou qui a déjà assisté à un entretien préalable à un éventuel licenciement peut utiliser ce mode de rupture (Cour de cassation, 16 novembre 2005, 28 juin 2006).
Par contre cette prise d'acte de rupture du contrat de travail ne peut intervenir après que le licenciement ait été prononcé, le contrat de travail étant déjà rompu.

En revanche, une prise d'acte peut intervenir alors que le salarié a engagé une procédure contre son employeur, auprès des prud'hommes en exécution d'une obligation en lien avec le contrat de travail (Cour de cassation 21 décembre 2006) .

Sous quelle forme s'effectue la prise d'acte ?

La prise d'acte n'est soumise à aucun formalisme.

La plupart du temps, le salarié envoie une lettre recommandée avec avis de réception (LRAR) ou il remet son courrier directement à l'employeur. Cela a l'avantage de dater précisément la prise d'acte et de ne laisser aucun doute sur le mode de rupture.

L'employeur n'a pas l'obligation de confirmer la prise d'acte de la rupture du contrat de travail.

Elle peut même être présentée par une personne agissant en tant que conseil du salarié, comme un avocat au nom de celui-ci (Cour cassation 4 avril 2007).

Chronologie de la prise d’acte de rupture

Chronologie de prise d'acte de rupture - Cliquez sur le diagramme pour l'agrandir
Chronologie de prise d'acte de rupture - Cliquez sur le diagramme pour l'agrandir

La prise d'acte de rupture s'accomplit selon un enchainement de faits chronologiques :

  • le salarié informe son employeur, il peut le faire par lettre recommandée avec accusé de réception, mais ce n'est pas obligatoire ;
  • l'employeur peut éventuellement accuser réception de la prise d'acte, mais cela n'est en aucune façon obligatoire ;
  • le contrat de travail est rompu, l'employeur réalise le "solde de tout compte".


A partir de là, plusieurs cas sont possibles :

  • l'employeur accepte la rupture, le salarié aussi, l'affaire s'arrête là ;
  • l'employeur accepte la rupture, le salarié conteste le solde de tout compte et saisit le Conseil des prud'hommes ;
  • l'employeur considère qu'il y a démission de son salarié qui logiquement contestera cette analyse en saisissant le Conseil des prud'hommes ;
  • l'employeur conteste la prise d'acte auprès du Conseil des Prud'hommes.


Afin d'avoir une vision globale du déroulement, un diagramme vous est proposé : cliquez sur l'image ci-jointe pour l'agrandir.

Conséquences de la prise d’acte de rupture du contrat de travail

Les conséquences sont différentes et dépendent de la décision prononcée par le Conseil des prud'hommes, ou la Cour d'appel ou bien de la Cour de cassation si l'affaire se termine devant cette juridiction.

Les juges devront examiner si les griefs invoqués par le salarié et qui l'ont conduit à rompre le contrat de travail sont fondés ou non. C'est une sorte de "pari sur l'avenir" qu'engage donc le salarié en prenant acte de la rupture du contrat de travail.

Il y a deux possibilités :

  • si les griefs sont fondés, donc jugés suffisamment graves, la prise d'acte de rupture du contrat de travail sera requalifiée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
  • si les griefs sont infondés, la prise d'acte de rupture du contrat de travail sera requalifiée en une démission du salarié.

Si la prise d’acte de rupture du contrat de travail est requalifiée en une démission

Le salarié n'aura donc pas droit à :


Ayant quitté l'entreprise immédiatement, le salarié risque de devoir payer une indemnité correspondant au préavis non effectué. Il peut aussi être condamné à rembourser à son employeur les frais que ce dernier aura engagé pour sa formation si une clause de dédit-formation a été conclue (Cour de cassation, 11 janvier 2012).

Le salarié aura droit, en revanche, à l'indemnité compensatrice de congés payés.

Si la prise d’acte de rupture du contrat de travail est requalifiée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse

Le salarié aura droit :

  • à l'indemnité de licenciement ;
  • à l'indemnité compensatrice de préavis ;
  • aux dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en (minimum 6 mois de salaire). Cette somme est exonérée de cotisations sociales et d'imposition sur le revenu au titre de dommages et intérêts ;
  • à l'indemnité compensatrice des congés payés ;
  • à des dommages et intérêts au titre de la perte d'une chance d'utiliser son droit individuel à la formation - DIF - (Cour de cassation, 18 mai 2011).

Autre conséquence importante pour l’employeur

S'il s'agit d'un salarié justifiant d'au moins deux ans d'ancienneté, employé dans une entreprise occupant habituellement 11 salariés, Pôle emploi peut, au surplus, demander à l'employeur de lui rembourser les allocations chômage versées au salarié ayant pris acte de la rupture, dans la limite de 6 mois d'indemnités de chômage.

Cf. Articles L1235-4, L1235-5 et R1235-1 du code du travail.

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